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TimFaitSonCinema
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UNE AUTRE VIE

Aurore est une jeune pianiste déjà célèbre. Alors qu’elle se trouve dans la maison familiale du sud de la France, elle fait la connaissance de Jean, un électricien venu poser une alarme chez elle. Entre eux, et malgré leurs différences, une passion intense va naître. Mais Dolorès, la compagne de Jean, est prête à tout pour le garder…
Verdict:
Un film qui, malheureusement, ressemble vite à une sorte d’étude de cas peu naturelle, avec des personnages un peu trop stéréotypés aux phrases toutes faites. C’est dommage car, sinon, l’ambiance générale n’est pas vraiment déplaisante.
Coup de coeur:

L’ambiance générale

La date de sortie du film:

22.01.2014

Ce film est réalisé par

Emmanuel MOURET

Ce film est tagué dans:

Drame amoureux

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 La Critique


Depuis le début des années 2000, Emmanuel Mouret s’est installé dans le paysage cinématographique français comme un réalisateur un peu à part, auteur (et acteur) de comédies romantiques souvent lunaires qui sont autant de variations autour du sentiment amoureux. Entre Changement d’adresse (vu il y a maintenant un certain temps) et son dernier (L’art d’aimer), il n’y avait finalement pas tant de différences, si ce n’est dans la forme (d’une vraie comédie à un film choral). On y retrouve à la fois son actrice fétiche (Frédérique Bel), lui-même dans le rôle d’un jeune homme un peu gauche mais aussi ce même côté extrêmement théâtral dans la façon de jouer, et, surtout, le même thème principal. Je m’étais dit que si le bonhomme ne changeait pas de style, je n’irais plus voir ses films. C’est un peu radical mais à force de faire le même long-métrage, je crois qu’il avait commencé à lasser un peu tout le monde, alors que certains de ses films pouvaient pourtant dégager quelque chose de sympathique. Et peut-être lui-même s’est-il lassé, ou bien m’a-t-il entendu (mais j’en doute) puisque, tout en restant dans des questions autour de l’amour, Emmanuel Mouret s’attaque à un film bien plus dramatique et, pour bien marquer le coup, il ne joue pas dedans et n’offre aucun rôle à Frédérique Bel. Dans les acteurs principaux, seule Virginie Ledoyen a déjà tourné avec le réalisateur. De plus, il met en scène JoeyStarr, dans un rôle à contre-emploi de ce que l’on peut imaginer pour lui, ainsi que Jasmine Trinca, découverte dans La chambre du fils puis dans le génial Romanzo Criminale et de plus en plus présente dans des productions françaises. Autant dire que la révolution est grande et mérite d’être saluée. C’est donc ce que j’ai fait en me rendant voir ce Une autre vie qui, sur le principe, n’avait pas l’air inintéressant. J’en suis ressorti assez circonspect car, si l’ensemble ne se tient pas si mal, ça a quand même eu du mal à réellement me convaincre.

Malgré tous les changements évoqués plus haut, Emmanuel Mouret garde quand même comme sujet principal l’amour. Il se livre ici à un exercice qui n’est pas nouveau dans l’histoire de l’art (cinéma comme littérature) puisqu’il s’agit du triangle amoureux. Ici, c’est un homme qui se retrouve tiraillé entre deux femmes si différentes et il ne sait pas bien quoi faire. Mais, en même temps, et là où le film est intéressant, c’est que c’est aussi une femme qui est tiraillée entre un homme et la compagne de celui-ci. En ce sens, c’est assez original car on n’est pas dans les schémas vraiment classiques (comme le grandiose Two lovers de James Gray par exemple), mais dans une sorte de thriller amoureux. Et c’est Dolorès, la compagne de Jean, qui tire les ficelles d’un jeu qui devient assez malsain au fil du temps. Ce n’est donc pas bête dans l’idée mais le souci, c’est que, un peu comme dans ses films précédents, on a le sentiment qu’Emmanuel Mouret cherche avant tout à montrer des choses sur l’amour plus qu’à les faire vivre par ses personnages. Ainsi, assez vite, Une autre vie ressemble à une sorte d’étude de cas où deux femmes qui sont chacune stéréotypées s’affrontent pour le même homme. L’une (celle que l’on suit plus particulièrement) est à la fois très gentille, voire naïve, et semble avoir une vision de l’amour un peu simpliste. L’autre, face à elle, est bien plus possessive et n’hésite pas à jouer sur différents tableaux pour garder son homme. Pour illustrer ce contraste, le scénario utilise bien évidemment la différence de style (vestimentaire notamment) mais aussi les dialogues et les discours sur l’amour. Et c’est là que le film m’a un peu dérangé : souvent, on n’a pas vraiment la sensation d’entendre l’un des personnages véritablement parler mais plutôt des phrases toutes faites et très générales sortir de leur bouche sans que cela fasse vraiment naturel. Cela est renforcé par l’écriture et le phrasé extrêmement théâtraux qui sont utilisés.

C’est dommage que l’ensemble manque autant de naturel car, sinon, Emmanuel Mouret arrive à créer une vraie ambiance. En plaçant cette histoire en Provence, près de la mer Méditerranée, il en profite pour prendre son temps et filmer à sa manière la nature, lui qui était jusque-là plutôt habitué aux appartements parisiens. Cela donne un charme particulier à Une autre vie, même si la réalisation n’est pas non plus exempte de tous défauts. Le montage est débord assez étrange, avec certains raccords très brutaux et d’autres qui, au contraire, prennent beaucoup de temps. Et j’avoue avoir eu du mal avec la musique du film, trop présente à mon goût et qui, la plupart du temps, ajoute de manière artificielle de l’émotion là où le silence ou plus de sobriété auraient sans doute pu faire plus d’effet. Car de l’émoi, il pourrait plus y en avoir devant cette histoire d’amour compliquée et forte par moments. D’ailleurs, les acteurs n’y sont pas étrangers avec un JoeyStarr qui campe avec justesse cet homme de plus en plus perdu, une Virginie Ledoyen qui, visiblement, prend beaucoup de plaisir à interpréter cette femme retorse sur les bords et Jasmine Trinca qui, pour le coup, m’a laissé un peu plus dubitatif. En effet, elle joue cette jeune pianiste visiblement fragile et elle insiste beaucoup sur ce côté dans son jeu, au point que ça en devienne un peu trop parfois et son accent italien fait bizarrement perdre pas mal de crédibilité à son personnage. Sans parler du fait qu’en faire la sœur de Stéphane Freiss ne fonctionne pas du tout (je ne sais pas qui a eu cette idée un peu folle…). Son personnage, pourtant central, ne m’a pas complètement convaincu et n’a pas réussi à m’emmener et, donc, à vraiment m’émouvoir. La fin du film, elle, est vraiment étrange, comme si Emmanuel Mouret, ne sachant plus bien où il allait, avait décidé de clore en vitesse son long-métrage. C’est un peu à l’image d’un film qui semble presque se chercher véritablement et qui ne trouve jamais le ton juste. Néanmoins, je suis content de voir Emmanuel Mouret passer à quelque chose de plus « sérieux » et je pense que ce galop d’essai pourra lui permettre de faire mieux la prochaine fois. En espérant qu’il ne retourne pas aussi vite à ses anciennes habitudes…



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