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TimFaitSonCinema
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FOXCATCHER

Mark Schultz est champion olympique de lutte et continue de s’entraîner dur avec son frère, lui aussi champion. Quand il se voit proposer d’emménager chez un homme très riche qui veut construire un centre d’entraînement haut de gamme, il y voit une opportunité à saisir. Une relation assez étrange va alors se mettre en place entre les deux frères et Du Pont, ce milliardaire aux visées mystérieuses…
Verdict:

Malgré quelques petites longueurs et une réalisation parfois un peu trop répétitive, Foxcatcher s’impose comme un film solide, réussissant à trouver le ton juste pour parler d’une histoire qui reste finalement assez mystérieuse. Les trois acteurs principaux sont excellents, avec une mention spéciale à Steve Carell, méconnaissable et glaçant.

Coup de coeur:

Le trio d’acteurs principaux

La date de sortie du film:

21.01.2015

Ce film est réalisé par

Bennett MILLER

Ce film est tagué dans:

Drame

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 La Critique


Grâce à ses deux premiers films, Bennett Miller n’est déjà plus du tout un inconnu du côté d’Hollywood. En effet, son premier long-métrage, Truman Capote, avait vu Philip Seymour Hoffman remporter l’Oscar du meilleur acteur alors que lui-même était nominé en tant que meilleur réalisateur. Autant que je m’en souvienne (je l’ai vu il y a pas mal de temps en DVD), c’était assez costaud. Avec Le Stratège, sa deuxième œuvre, il avait continué à séduire avec de très nombreuses nominations (je crois qu’il en cumule pas moins de onze avec ses deux premiers films, auxquels on peut rajouter les cinq pour Foxcatcher). Celui-là, pour le coup, je ne l’ai jamais vu. Même s’il est toujours difficile de tirer des plans sur la comète après une carrière aussi courte, on retrouve quand même deux points communs dans celle-ci : le rapport à une histoire vraie, puisque Truman Capote, tout comme Billy Bean (le héros du Stratège) sont des personnages qui ont vraiment existé, et cette capacité à « créer » des acteurs dramatiques. C’était Philip Seymour Hoffman dans Truman Capote puisque, bien que tout le monde connaisse le talent de l’acteur, on ne lui avait donné que rarement une vraie possibilité de s’exprimer. Et c’était Jonah Hill (un collaborateur fidèle des frères Apatow) dans Le Stratège. Les deux ont ensuite pu exprimer cette facette dans d’autres longs métrages. Et ce qui est amusant, c’est que Foxcatcher présente encore les deux mêmes facettes : l’histoire qui est racontée est tirée de faits réels, qui, d’ailleurs, ont beaucoup ému à l’époque aux Etats-Unis (en France, c’est un événement bien moins connu) et Bennett Miller a choisi Steve Carell pour l’un des rôles principaux alors que ce dernier est surtout reconnu pour ses prestations comiques. On peut donc avoir l’impression que le réalisateur conserve des ficelles qui, jusque-là, marchent bien. Sans doute, mais il n’en reste pas moins qu’il livre avec Foxcatcher un long métrage plutôt réussi.

 

Ce que l’on peut commencer par dire, c’est que Bennett Miller ne cherche pas à faire du cinéma spectaculaire, loin de là. Pourtant, quand on tourne un film autour du sport, c’est une tentation que l’on pourrait avoir, mais le metteur en scène en est ici très loin. Il essaie plutôt de construire tranquillement son histoire, sans brusquer le rythme, en insistant toujours sur les relations qui lient chacun des personnages qui, chacun, ont le temps de s’exprimer. Ainsi, le début du film est assez impressionnant car on voit d’abord Mark s’entraîner seul (nous reviendrons là-dessus plus tard) avant d’être rejoint par son frère qui est aussi son entraîneur. Les deux commencent alors un combat qui débute comme un ballet – le bruit des corps entre eux ou contre le tapis servant d’appui musical à une chorégraphie bien huilée – avant de finir presque en bataille de rue. On comprend alors toutes les difficultés qui peuvent exister entre Dave et Mark, deux frères champions olympiques, mais qui semblent bien différents. Et c’est la rencontre entre Mark et John Du Pont qui va encore renforcer ces soucis. En effet, une relation assez fusionnelle va vite se créer entre le milliardaire et Mark, qui voit en lui comme un père de substitution et une occasion de s’affirmer par rapport à son frère. Mais, dès le début, on comprend que ce lien sera forcément toxique pour le lutteur car Du Pont n’est pas du tout équilibré : mégalomane, paranoïaque, il introduit Mark dans son monde tout en le laissant à l’écart. En ce sens, Foxcatcher fait penser à The Master, dans la façon de décrire une relation quasi-incompréhensible (mélange de fascination et répulsion) avec l’un des protagonistes qui ressemble à un gourou tant il essaie de prendre l’ascendant sur l’autre. Mais, en plus, là, il y a une vraie part de mystère autour de Du Pont que le scénario décide de ne pas lever : le rapport à sa mère semble essentiel mais celle-ci plane comme une ombre, sans jamais dire un mot ; la question de son homosexualité est aussi suggérée mais jamais vraiment affrontée.

 

Là où Foxcatcher est aussi assez intéressant, c’est dans la manière qu’il a de montrer les dessous d’une réussite sportive et les sacrifices que cela engage. Mark Schultz est quand même champion olympique mais il vit au départ seul, dans un coin paumé, et est obligé de négocier de l’argent pour aller intervenir dans une école. Et puis, d’autres sujets sont évoqués, comme la question de la lutte des classes ou encore d’une certaine transformation de l’Amérique de la fin des années 80 (la période Reagan). Bien que ce ne soit pas le sujet principal du long métrage, on ne peut pas non plus dire que ce soit véritablement en arrière-plan puisque cela infuse dans les relations qui sont au cœur du récit. Pour mettre tout cela en images, Bennett Miller utilise une mise en scène somme toute assez classique, et pas toujours inventive, mais qui a le mérite de coller à son sujet. Grâce à une lumière très crue (beau travail de photographie) et une musique quasi-absente, il accompagne son récit, en utilisant beaucoup d’ellipses et de non-dits, le tout dans un montage parfois un peu déroutant. Mais ce que l’on retient quand même principalement de Foxcatcher, c’est la performance des trois acteurs. Si Mark Ruffalo est très bon (mais c’est une habitude pour lui), les deux autres marquent encore plus les esprits, notamment parce qu’on ne les attendait pas vraiment là. Chaning Tatum, même s’il a un peu évolué, reste souvent cantonné à un rôle de beau gosse musclé. Là, justement, il utilise sa musculature à d’autres fins, et joue parfaitement la partition d’un homme qui voit dans une relation une porte de sortie avant de comprendre peu à peu ce que cela implique. Steve Carell, lui, est méconnaissable (au sens propre du terme) et il est tout simplement glaçant. Un peu comme ce film qui n’est pas du genre à prendre le spectateur par la main mais laisse plutôt ce dernier seul juge de ce qui se déroule sous ses yeux… et ce n’est pas forcément la position la plus évidente tant le tout est malsain…




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