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TimFaitSonCinema
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BLACK COAL

En 1999, des restes de corps sont découverts dans plusieurs sites de traitement du charbon. L’enquête avance mais l’inspecteur est blessé lors d’une interpellation qui tourne mal et doit abandonner l’affaire. Cinq ans plus tard, deux meurtres directement liés au premier le font reprendre du service et vont le pousser à des découvertes étonnantes.
Verdict:

Un vrai film d’ambiance qui, sous couvert d’une enquête policière finalement pas si importante, nous plonge au cœur de la société chinoise actuelle et de la violence qu’elle induit. Parfaitement mis en scène mais parfois un peu brouillon, Black Coal n’en reste pas moins un film très intéressant.

Coup de coeur:

L’ambiance générale

La date de sortie du film:

11.06.2014

Ce film est réalisé par

Diao YINAN

Ce film est tagué dans:

Drame Thriller

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 La Critique


Décidément, le cinéma chinois est très en forme actuellement. Alors que, en fin d’année dernière A touch of sin, avait visiblement marqué beaucoup d’esprit, voici que s’avance dans les salles ce que l’on peut considérer être d’une certaine façon comme son petit frère ou, en tout cas, un proche cousin. Personnellement, le long métrage de Jia Zhang Ke ne m’avait pas complètement retourné et je l’avais trouvé formellement très bon, bien qu’il ait été très loin de me toucher. Diao Yinan est beaucoup moins célèbre que son ainé puisque c’est seulement son troisième film mais les deux premiers avaient déjà été remarqués par les festivals et notamment celui de Cannes qui avait laissé une place à Train de Nuit dans la section Un certain regard en 2007. Black coal (on rediscutera assez vite de la question du titre), lui, a été sélectionné à la dernière Berlinale (en février dernier) où il a fait un véritable carton repartant avec l’Ours d’Or du meilleur film et celui d’Argent du meilleur acteur. C’est donc précédé d’une certaine aura qu’il est arrivé chez nous et, il faut bien le dire, c’est avec une excitation certaine que je suis allé le voir pour me faire une idée. Occupons-nous tout de suite de l’histoire du titre car, parfois, les distributeurs font des choses pour le moins étranges. Au départ, la traduction du titre original donne «  Feu d’artifice en plein jour » (titre énigmatique mais qui prend tout son sens au cours du film) puis, à l’international, le long métrage s’est intitulé Black coal, thin ice (« charbon noir, glace fine ») et, en France, on a gardé de manière assez incompréhensible que la première partie, sans la traduire. Le titre est quand même signifiant mais finalement bien moins que ce qu’il aurait pu être. Le plus important reste quand même le film en lui-même et Diao Yinan nous offre un long métrage vraiment intéressant, et ceci selon différents aspects.

 

Et ça commence très fort puisque l’on suit d’entrée de jeu un morceau de corps humain emmitouflé dans une couverture et se trouvant au milieu d’un tas de charbon (d’où le titre, évidemment), de la benne où il se trouve jusqu’au tapis où il finira par être découvert par un employé. C’est en fait le point de départ d’une enquête qui va se dérouler sur cinq années, avec, tout de même, une grande ellipse au milieu. Et cette enquête va nous tenir en haleine. Car elle rebondit au moins deux fois de façon, si ce n’est surprenante, au moins assez originale. Il y a en fait tous les éléments d’un film noir : un enquêteur un peu trouble, une femme fatale, un mystérieux assassin, des poursuites, quelques coups de feu, du suspense… Le réalisateur n’hésite vraiment pas à utiliser tous les codes de ce genre tout en se les réappropriant et en leur donnant une signification particulière. Ainsi, la scène de filature est assez extraordinaire car, au bout d’un moment, on finit par ne plus bien savoir qui est celui qui suit l’autre. En effet, en un mouvement de caméra, on change de perspective et on se retrouve un peu surpris. D’ailleurs, c’est parfois un peu brouillon dans la narration, même si, en tant que spectateur, on ne perd jamais le fil et on est plutôt attiré par cette histoire de meurtres qui ressurgit et qui implique une femme avec laquelle cet ancien flic un peu taciturne va se lier de manière étrange (on ne comprend pas bien la relation qui va les pousser à toujours se rencontrer). D’ailleurs, les deux acteurs principaux sont assez géniaux, elle pour jouer à fond le mystère et lui pour interpréter toutes les facettes d’un personnage pas facile à saisir et qui, grâce à tous les rebondissements de l’enquête, va finir par retrouver un certain sens à sa vie. La fin est ainsi magnifique car elle est à la fois mystérieuse bien que finalement très signifiante.

 

Mais, comme souvent dans ce genre de films, l’enquête policière va finir par passer un peu au second plan, derrière un aspect bien plus naturaliste et qui met une nouvelle fois en exergue les problèmes qui se posent aujourd’hui en Chine (peut-être aussi sommes nous, public occidential, plus sensibles à cela). C’est tout de même bien moins le cas que dans A touch of sin où, clairement, les différentes histoires étaient au service d’une dénonciation de la société chinoise. Là, il y a quand même une histoire qui se tient et qui sert plus que de simple fil rouge. L’ambiance générale fait nécessairement penser au long métrage de Jia Zhang Ke puisqu’on se trouve dans une Chine qui est encore en pleine révolution industrielle, où la modernité est présente mais où la vie est loin d’être évidente et engendre surtout une violence psychologique et physique de tous les instants. C’est peut-être montré ici avec moins de force mais, une nouvelle fois, ça pose réellement question et le côté presque documentaire du film à certains moments renforce cette sensation d’être devant une société pleine de paradoxes et pas loin d’exploser (là encore, la fin peut en être un certain symbole). Mais là où le réalisateur est très fort, c’est qu’il parvient à nous montrer tous ces aspects tout en s’inscrivant dans un décor qui, parfois, semble presque pas naturel tant il est particulier. En effet, on se retrouve dans une ville presque comme prise par les glaces, où la neige est toujours présente et certains lieux et objets liés à cette glace vont avoir une importance toute particulière (comme cette patinoire qui ouvre directement sur une route où se déroulera une course poursuite). Cela créé une réelle ambiance qui est pour beaucoup dans la réussite de ce film, car elle correspond bien à ce que peuvent vivre les personnages dans leur ensemble et elle est parfaitement mise en scène par un réalisateur qui livre là un long métrage vraiment de qualité. Pas toujours exaltant mais dans l’ensemble prenant et parfois impressionnant.




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