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TimFaitSonCinema
Pendant dix ans, une équipe de la CIA, et plus précisément une femme, a traqué Oussama Ben Laden, considéré comme l’instigateur des attentats du 11 septembre. Jusqu’à cette nuit de mai 2011 où l’opération [i]Neptune’s Spear[/i] a été lancée.
Verdict:
En choisissant de raconter dans un style quasi-documentaire dix ans de traque, Kathryn Bigelow s’attaque à un projet plus qu’ambitieux. Assez formidable à certains moments, son film pêche un peu parfois par manque de liant, notamment dans sa première partie. Mais ça reste quand même pas mal du tout et Jessica Chastain y est excellente.
Coup de coeur:

Jessica Chastain

La date de sortie du film:

23.01.2013

Ce film est réalisé par

Kathryn BIGELOW

Ce film est tagué dans:

Thriller

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 La Critique


Hollywood est sans cesse sur le qui-vive en matière d’évènements adaptables au cinéma et les films basés sur des faits réels sont devenus monnaie courante. Ce qui s’est passé dans le monde ces dix dernières années, et notamment la guerre en Irak, a ainsi fourni une matière plus qu’intéressante dont des réalisateurs se sont emparés (Kathryn Bigelow, déjà, avec Démineurs ou encore Paul Greengrass avec Green zone). Cette fois-ci, ce n’est pas sur un évènement en particulier que la seule réalisatrice oscarisée veut revenir mais bien sur quelque chose qui se passe beaucoup plus en filigrane et qui, par contre, permet d’expliquer et de comprendre un grand nombre de faits qui se sont déroulés partout dans le monde depuis le 11 septembre 2001. Il s’agit de la traque d’Oussama Ben Laden par une équipe, et plus particulièrement par une enquêtrice dont on ne connaît que le prénom, Maya. Le projet était assez ancien puisqu’un premier scénario sur ce sujet avait été écrit et s’apprêtait à être filmé quand l’opération militaire a eu lieu. Les plans de la réalisatrice et du scénariste ont donc été bouleversés mais ils ont décidé très vite de se servir de cette mort dans le script et d’en faire finalement le point final (c’était donc presque plus pratique pour faire une vraie conclusion…). Basé sur des faits réels, ce qui est annoncé dès le départ, Zero Dark Thirty est une œuvre assez impressionnante, bien que manquant parfois un peu de liant et se perdant donc un peu dans un scénario extrêmement riche, peut-être trop.

On peut d’abord se demander si le fait d’avoir réécrit en « catastrophe » le scénario ne fait pas perdre une bonne partie de la puissance du film. En effet, on a parfois l’impression de voir des séquences qui auraient bien plus trouvé leur place dans le premier projet pré-opération militaire. Elles sont plus générales et s’écartent un peu du point central de l’histoire : la traque de Ben Laden. Cela montre bien sûr que cette enquête sans fin, menée par un tout petit groupe, connaît des échecs et ne permet pas d’endiguer le terrorisme, loin de là, puisque, dans le monde entier, des attentats continuent à être commis. Mais à force de trop vouloir montrer de choses différentes, le film a un peu tendance à se perdre et à en oublier son objet premier. Zero Dark Thirty est divisé en cinq chapitres, d’environ une demi-heure chacun, et qui sont autant d’évolutions dans l’enquête sur Ben Laden et, surtout, sur le lieu où il se trouve. Il y a de vraies ellipses temporelles puisque, pendant presque six ans, rien ou presque n’a avancé dans cette traque pourtant incessante. Maya pense tenir une piste mais personne ne veut véritablement la croire et elle manque de preuves matérielles. C’est un peu par hasard qu’elle va voir son idée de départ réactivée. A partir de là, l’enquête se fait moins virtuelle et beaucoup plus réelle puisque ce sont des techniques de terrain qui sont utilisées (filature, écoutes,…). Le film prend alors véritablement de l’ampleur, ce qui est moins net auparavant.

Pendant une heure et demie, on est donc dans quelque chose de moins « palpable » et de pas facilement appréhendable. Je trouve que le tout manque un peu de nerf par moments et les ellipses sont trop nombreuses pour qu’on se mette réellement dans l’histoire. On change tout le temps d’endroits, de période, de personnes,… Ce n’est pas forcément évident de toujours suivre ce qui se passe et on a l’impression de rater certains éléments. Par contre, là où c’est assez intéressant, c’est dans la manière de montrer le poids et le rôle d’une personne dans une traque de cette ampleur, notamment pour le symbole qu’elle représente. Cette femme va essayer de remuer ciel et terre, elle risque sa vie, et va perdre des amis, dans ce combat contre le terrorisme mais aussi, parfois, contre sa propre hiérarchie. Le film a aussi beaucoup fait parler de lui pour la place qu’il donne à la torture. En effet, on se rend bien compte après avoir vu Zero Dark Thirty que des méthodes assez terribles ont été utilisées pour faire avouer certaines personnes et ainsi pouvoir poursuivre l’enquête. La réalisatrice ne cache rien de tout cela et débute notamment le film par une séquence assez terrible de torture dans tout ce qu’elle a de pire : à la fois physique et psychologique. On aura droit à quelques passages comme cela, assez durs à supporter, mais qui font malheureusement partie intégrante de cette histoire. En ce sens, on peut parler de Zero Dark Thirty comme d’un film coup de poing, qui permet de prendre conscience de certaines réalités crues. De là à en faire des polémiques pas possibles… Du moment que le scénario se base sur des éléments du réel et que, d’ailleurs, le gouvernement a reconnu l’usage de la torture dans les interrogatoires, je ne vois pas bien où est le problème. C’est au spectateur de se faire une idée sur ce qu’il a devant les yeux. D’ailleurs, en mettant dès le début à la suite, des extraits de voix tirées du 11 septembre puis l’épisode de torture, le scénario montre bien l’horreur que l’on trouve dans les deux camps. C’est à partir de ce contraste que le film se construit et essaie de rendre de la manière la plus minutieuse possible ces dix années d’enquête.

Le tout est filmé de manière quasi-documentaire avec une caméra qui, volontairement, fait pas mal de mouvements. Cette façon de faire colle bien à un tel sujet. D’ailleurs, pendant toute l’opération militaire finale, on a l’impression de se trouver immersion totale avec ces soldats : on peut parfois voir à travers leurs yeux avec ces lumières nocturnes. Kathryn Bigelow a aussi, dans sa réalisation, un vrai talent pour faire monter la pression lors de certaines séquences. En tant que spectateur, on sent peu à peu qu’il va se passer quelque chose mais ce n’est pas forcément la musique qui, comme souvent, nous flèche le tout. Non, c’est beaucoup plus subtil que ça puisqu’elle se sert du rythme (avec un imperceptible ralentissement) ou des changements de points de vue pour mettre en place cette forme de suspense. Pour ce qui est de l’habillage musical, Kathryn Bigelow fait avec ce qui se fait de mieux sur le marché aujourd’hui, c’est-à-dire Alexandre Desplat. Ce dernier nous offre une partition honnête, qui est tout à fait dans l’ambiance recherchée et qui n’écrase jamais l’image. Jessica Chastain, elle, prouve une nouvelle fois qu’elle est bien une excellente actrice. Elle montre en tout cas parfaitement l’évolution de son personnage, au départ très mal à l’aise devant les actes de torture commis et qui va finalement prendre de plus en plus d’assurance dans un monde presque exclusivement masculin afin de se faire respecter et d’imposer ses choix. Les toutes dernières séquences sont assez révélatrices de l’effet que tout cela a pu avoir sur le personnage. D’après pas mal de bruits différents, elle devrait récupérer cette année la statuette de meilleure actrice, ce qui ne serait pour le coup pas immérité. Pour ce qui est du film dans son ensemble, malgré d’indéniables qualités, il ne me semble pas vraiment atteindre le niveau qu’on aurait pu espérer…



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