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TimFaitSonCinema
Dans l’Inde profonde, on suit le destin de quatre femmes qui doivent faire face aux traditions sociétales qui donnent une place bien plus importante aux hommes. Chacune à leur manière, et grâce à leur amitié, elles vont tout faire pour s’émanciper et trouver un sens à leurs vies…
Verdict:

La saison des femmes est un long métrage fort par ce qu’il raconte et ce qu’il dénonce, notamment grâce à un propos percutant et à l’énergie des actrices principales. A côté de cela, la construction d’ensemble et la réalisation plus que moyennes ne permettent pas d’en faire un grand film. Ça reste quand même une œuvre à voir, plus pour ce qu’elle dit que comment elle le dit…

Coup de coeur:

La force du propos

La date de sortie du film:

20.04.2016

Ce film est réalisé par

Leena YADAV

Ce film est tagué dans:

Drame

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 La Critique


Un film indien qui arrive directement dans nos contrées, c’est suffisamment rare pour être signalé. En effet, si les cinéastes occidentaux ne rechignent pas à aller tourner des longs métrages en Inde (on pense évidemment à Slumdog Millionaire de Danny Boyle mais j’ai aussi le pathétique Trishna de Michael Winterbottom en tête), il est bien moins fréquent d’avoir des productions du pays qui parviennent jusque chez nous. Il y a deux ans et demi, c’est The Lunchbox qui avait créé une mini-sensation en réussissant un score plus qu’honorable. Il faut dire que c’était plutôt sympathique et, surtout, on sortait des clichés que l’on peut avoir sur le cinéma indien (comédies romantiques tournées à la chaine, qui se finissent nécessairement par des chants et des danses), ce qui n’était pas plus mal. La saison des femmes a, pour le coup, une histoire particulière puisqu’il n’arrive pas chez nous grâce à un succès dans son pays natal. Bien au contraire puisqu’il n’est toujours pas sorti là-bas. En effet, il doit encore passer la case du comité de censure, et, autant dire les choses, ce n’est pas forcément gagné de ce côté-là… Car la réalisatrice est très loin d’être tendre avec son pays et, notamment su la question de la place de la femme dans une société traditionnelle encore très marquée par la prédominance de l’homme. Et ce qui est assez « amusant », c’est le parallèle qui peut être fait avec Mustang (pas vu eu cinéma mais en DVD), film qui se base sur les mêmes problématiques en Turquie et dont certains points communs sont troublants. Dans les deux cas, il y a quatre personnages féminins principaux qui, à leur façon, se battent contre des réalités machistes ancrées et, dans les deux cas, c’est une femme qui est derrière la caméra. Faut-il donc être du sexe féminin pour s’attaquer à ces sujets ? Visiblement, oui… Mais, au-delà de ce thème, La saison des femmes est-il un bon film de cinéma ?

 

En fait, pour être honnête, j’ai un vrai souci au moment de donner un avis véritable sur ce film et cela tient principalement au fait que l’on n’a pas le « droit » de ne pas apprécier un tel long métrage. Le propos et le courage qu’il a fallu pour réaliser cette œuvre font que l’on ne peut qu’admirer le projet dans sa globalité et il est difficile d’en dire du mal. Mais, en même temps, La saison des femmes est fort par ce qu’il montre et ce qu’il dénonce plutôt que par ce qu’il est véritablement en tant que film. C’est ce qui le rend si difficile à juger. Mais, on va s’y atteler, d’autant qu’au final, ça m’a plutôt plu, malgré toutes les réserves que je développerai. Commençons quand même par ce qui fait le réel intérêt de ce long métrage, à savoir son sujet. En effet, Leena Yadav n’a pas eu peur d’attaquer de manière plutôt frontale une réalité prégnante de l’Inde actuelle, celle du machisme ambiant, voire pire. Cela résonne d’ailleurs avec l’actualité puisque des affaires de viol ou de harcèlement font souvent les gros titres dans ce pays. Les femmes ont donc du mal à trouver une autre place que celle de mère ou épouse d’un côté ou de simple objet du désir des hommes de l’autre (les deux semblant d’ailleurs difficilement conciliables). Et c’est vraiment cette réalité qui est au cœur de toute l’histoire. Par l’intermédiaire de quatre personnages différents (très bien interprétés), le scénario nous montre presque toutes les situations, des plus banales aux plus dures. Ce qui marque vraiment avec ce long-métrage, c’est sa manière de ne jamais céder au véritable drame, alors que tout pourrait y conduire, mais de toujours réussir à rebondir sur des aspects plus comiques (scènes avec le téléphone portable par exemple), à l’image de ces femmes qui se relèvent de tout et choisissent de ne jamais se laisser abattre. Cela lui donne un ton singulier et loin d’être désagréable.

 

On peut vraiment saluer l’intransigeance de la réalisatrice qui ne nous épargne pas grand-chose et qui n’hésite pas à taper très fort sur l’attitude des hommes en général. Bien sûr, quelques uns ont un comportement différent mais ils sont une minorité et servent plutôt à (dé)montrer la bassesse du comportement de tous les autres. Mais, pour cette vision des hommes, comme pour un peu tout le reste, le souci principal de La saison des femmes reste son côté un peu trop caricatural. Les quatre personnages féminins sont de véritables archétypes (la veuve, la jeune juste mariée, la femme battue et la prostituée) et si elles évoluent au cours du long métrage, le scénario peine à leur donner une vraie consistance au-delà du rôle qui leur est assigné au départ. Par contre, ce qui est assez intéressant, c’est la façon dont, tout en étant victimes de tout un système, elles participent, chacune à leur manière, à le faire persister, ce qui montre l’extrême difficulté à dépasser le poids des traditions. Un autre thème, sans doute trop peu exploré, aurait pu être une piste à suivre davantage : c’est celui de l’intrusion de la modernité technologique et de son influence (pas si bénéfique) sur la condition féminine. Ce qui pêche vraiment dans ce film est plutôt à voir du côté de la construction d’ensemble et de la mise en scène. En effet, entre un côté vraiment didactique par moments (on voit vraiment les ficelles), des parallélismes trop évidents (sur la fin, notamment) et des scènes parfois à la limite du grotesque (la scène d’amour dans la grotte est un sommet), on ne peut pas dire que La saison des femmes brille du côté de la réalisation. Même les scènes de chant et de danse (passage obligatoire d’un film indien même si, là, elles ont un sens différent) sont particulièrement ratées… Mais il reste qu’on est entrainé dans cette histoire, avec son rythme particulier, ses interprètes très justes, sa musique parfois entêtante et, surtout la puissance de son propos. C’est bien cela qui doit le plus retenir l’attention.




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