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TimFaitSonCinema
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MARGIN CALL

Eric Dale, responsable des risques d’une grande filme financière, vient de se faire licencier. Avant de partir, il remet un fichier sur lequel il travaillait à un jeune collaborateur. Très vite, celui-ci comprend les implications des résultats qu’il trouve. C’est vite le branle-bas de combat dans l’immeuble…
Verdict:
Un thriller intelligent sur la crise financière qui pèche un peu du fait d’une construction trop marquée et de quelques longueurs. Les acteurs, eux, sont parfaits.
Coup de coeur:

Le casting, impeccable

La date de sortie du film:

02.05.2012

Ce film est réalisé par

J.C. CHANDOR

Ce film est tagué dans:

Thriller psychologique

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 La Critique


Le cinéma américain semble de plus en plus proche des évènements qui marquent le monde, et surtout les Etats-Unis. On peut le voir depuis une dizaine d’années avec des films qui sortent deux ou trois ans après que quelque chose d’important se soit passé. Le 11 Septembre a ainsi été une source d’inspiration, la guerre en Irak aussi et ça continue encore aujourd’hui. Il y a par exemple en préparation un film sur la traque de Ben Laden, réalisé par Kathryn Bigelow, projet lancé avant la mort de l’ancien chef d’Al Qaida. Cela répond à la fois au manque de créativité des studios mais aussi, sans doute, à une aspiration des réalisateurs de s’appuyer sur quelque chose de solide afin de ne pas être accusés de faire n’importe quoi. Un évènement comme la crise financière qui sévit depuis quatre ou cinq ans dans le monde, et qui a pour origine principale les Etats-Unis, devait avoir son film emblématique. Et c’est J.C. Chandor, tout jeune dans le milieu du cinéma (il était publicitaire depuis une quinzaine d’années) qui s’attaque à ce morceau en écrivant et réalisant Margin Call, un film pas forcément excellent mais qui a le mérite de s’interroger et d’interroger sur cet épisode de façon plutôt intelligente.

Pendant plus d’une heure et demie, on est plongé vraiment au cœur d’une firme (probablement une banque) qui connaît déjà des problèmes. Le film commence en effet par une séquence assez incroyable de licenciements et notamment celui de l’homme qui va tout déclencher : Eric Dale. Rude et cynique, cette scène nous met tout de suite dans le ton. Quand il s’en va et donne les informations à l’un de ses collaborateurs, les choses s’emballent durant les heures suivantes. En effet, presque tout le film se passe durant un laps de temps très court, celui d’une nuit où tout peut basculer pour la firme. Des décisions doivent être prises, qui ne seront pas sans conséquences. Car c’est là que se situe le véritable cœur du film : dans la façon dont est décidé ce que fera l’entreprise pour éviter la banqueroute. Là, plusieurs personnages s’opposent sur les choix à faire, car ceux-ci impliquent des effets dévastateurs, à la fois pour la banque elle-même mais aussi pour ceux à qui elle va revendre les actifs toxiques. Tout le monde n’est pas d’accord sur la façon de procéder et, une fois le choix fait, certains devront irrémédiablement quitter l’entreprise, alors que d’autres réussiront à garder leur poste.

Une lutte sans merci s’engage alors entre les personnages principaux où tous les coups – notamment financiers – sont permis. Ce sont les discussions entre ces hommes et cette femme qui vont faire évoluer leur position mais aussi l’intrigue dans son ensemble puisque tout est lié aux décisions de certains. Justement, ce qui m’a dérangé dans ce film, c’est la façon dont la structure du film est beaucoup trop visible et en devient presque « automatique ». L’information monte peu à peu les étages – au sens propre comme au figuré – de la direction jusqu’à cette réunion où tout le directoire du groupe est convoqué par le grand chef, sorte de point central du film. Cette réunion est assez impressionnante dans la façon dont elle met en relation des personnes qui ne sont pas du tout du même rang de décision (du directeur au simple consultant junior), comme si le bouleversement en cours rebattait toutes les cartes. De plus, ces personnes n’ont pas la même opinion sur la stratégie à adopter. C’est aussi là que se découvre le chef de la firme, un homme sans scrupule et aux méthodes plutôt radicales. À partir de là, il y a une redescente progressive alors que le jour se lève où les discussions deviennent plus personnelles. Celles-ci se font deux par deux : entre chefs et subordonnés, entre collaborateurs,… Ces moments ne sont pas forcément assez liés entre eux et cela donne l’impression que ce n’est pas très naturel. La dernière séquence, plus symbolique qu’autre chose, m’a aussi laissé sur ma faim.

La réalisation a le mérite d’être assez froide et clinique, en lien avec l’univers aseptisé des bureaux dans lesquels l’intrigue se déroule et où seuls les écrans perpétuellement allumés mettent de la couleur. Il y a dans le scénario quelques longueurs dans les dialogues et des fioritures et digressions pas forcément utiles. Mais l’intrigue se tient quand même et une forme de suspense parvient à subsister tout le long. Ce film a aussi le mérite de rester simple alors que le monde de la finance est normalement assez opaque. Là, il n’y a pas de grands discours compliqués sur telles ou telles données. De plus ; si le long-métrage est rempli de personnes et de répliques particulièrement cyniques, le propos, lui, n’est pas moralisateur. Il replace en effet au cœur du système financier des hommes et des femmes, qui, s’ils sont un peu déconnectés de la vie réelle (voir les dialogues à propos des salaires), prennent des décisions sans forcément avoir véritablement le choix. Des dilemmes se posent à certains, mais la morale a du mal à résister aux millions. Pour incarner ces personnages, le casting est assez incroyable avec un Paul Bettany vraiment crédible en trader, un Jeremy Irons glaçant en directeur sans foi ni loi, un Simon Baker tout en contrôle et un Kevin Spacey en « droopy désabusé ». Margin Call n’est donc pas un brulot anticapitaliste mais plutôt un film qui permet de réfléchir à la place accordée à certaines personnes dans le monde financier.


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Anna21 08.05.2012, 02:03

Je ne suis pas vraiment d'accord lorsque tu dis : " Le cinéma américain semble de plus en plus proche des évènements qui marquent le monde, et surtout les Etats-Unis". Il y a souvent eu un cinéma "d'actualités" aux USA. Prends la guerre du Vietnam par exemple, qui fut traitée dans de nombreux films. Je dirais qu'il s'agit plus d'un genre cinématographique "thérapie", qui, lors d'une crise, permet aux réalisateurs de s'exprimer, de se défouler sur des moments.
Le cinéma anglo-saxon fonctionne aussi de cette façon, avec un traitement assez important de la période dure entre le Royaume Uni et l'Ira ("Au nom du père" "hunger"...). Ce film m'a paru intéressant dans le ressenti, c'est à dire dans le fait que l'on ne se rend jamais vraiment compte du problème réel et que cet univers semble coupé de la réalité... un peu comme dans la "vraie vie" en somme.
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Timfaitsoncinema 08.05.2012, 07:27

Quand je dis : "de plus en plus proche", c'est qu'il semble y a voir de moins en moins de temps entre l'évènement et la date de réalisation. Bien sûr, le cinéma a toujours traité de ce qui se passait réellement, mais ce qui me marque, c'est "l’immédiateté" de réaction du cinéma...
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mht 14.05.2012, 11:54

J'avais lu ta critique avant d'aller voir ce film dont une amie m'avait d'ailleurs dit le plus grand bien...Cela m'a permis de le regarder avec une grille de lecture intéressante, je trouve tes analyses très justes et pertinentes.
L'un de ses mérites -et pas le moindre- et de parler de choses compliquées de façon simple et de ne pas présenter une vision manichéenne des choses.
Pas de vrai coup de coeur pour moi comme pour Barbara mais un film à voir qui fait réfléchir sur l'univers de la finance et ses impasses individuelles et collectives parfois.
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MHT 14.05.2012, 11:56

Correction : il faut lire " l'un de ses intérêts EST....", évidemment !


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