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TimFaitSonCinema
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LA CHASSE

Lucas est un ancien prof devenu éducateur dans un jardin d’enfants. Un jour, une petite fille l’accuse de pédophilie. Alors que le village est peu à peu au courant, débute alors pour lui une vraie descente aux enfers…
Verdict:
La chasse fait partie de cette catégorie de films qui dégagent vraiment quelque chose, malgré certains défauts, sans que l’on puisse forcément expliquer le pourquoi ni le comment. Sans doute la performance de Mads Mikkelsen n’y est pas étranger…
Coup de coeur:

Mads Mikkelsen

La date de sortie du film:

14.11.2012

Ce film est réalisé par

Thomas VINTERBERG

Ce film est tagué dans:

Drame

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 La Critique


Depuis quatorze ans, Thomas Vinterberg, considéré à la fin des années 90 comme le futur du cinéma mondial, s’est un peu égaré. En 1998, il provoquait un grand choc avec Festen, film assez incroyable sur un diner de famille qui tourne mal suite à des révélations sur de terribles secrets. C’était tourné selon les préceptes du Manifeste du Dogme95 dont Thomas Vinterberg était l’un des initiateurs (pas d’accessoires, pas de traitement de l’image, caméra à la main,…) et, au Festival de Cannes, le long-métrage avait marqué le jury qui lui avait décerné le Prix du Jury. Ensuite, il fait bien dire que le Danois s’est un peu perdu entre films avec gros casting (It’s all about love) ou d’autres plus confidentiel (Submarino) qui ont tous deux été d’immenses flops commerciaux. On commençait un peu à douter du retour du Danois au premier plan et, pour cela, il aura donc fallu attendre pas moins de quatorze ans pour que l’un de ses films connaisse de nouveau une reconnaissance, à travers une sélection officielle au Festival de Cannes pour La chasse. En mai dernier, ce film aura créé la mini-polémique (parce qu’il faut toujours qu’il y en ait une), certains voyant dans le long-métrage un discours assez discutable, notamment sur la parole de l’enfant. Car La chasse est encore un film qui aborde le sujet du viol et de la pédophilie, mais cette fois-ci, dans un village, communauté autonome où tout le monde se connaît. Et, La chasse est un film assez impressionnant, bien que loin d’être parfait.

Thomas Vinterberg s’attèle donc avec son film à un thème à la fois un peu tabou au cinéma et très complexe à véritablement mettre en scène : comment les simples paroles d’une petite fille peuvent faire à ce point évoluer les mentalités dans une petite communauté fermée à propos d’un homme qui y est, semble-t-il, plutôt intégré. En un sens, il y a un vrai parallèle avec Festen dans cette manière de voir une parole comme le déclencheur de tout un processus presque inéluctable. Dès le début du film, on voit d’ailleurs que Lucas – Mads Mikkelsen, comme souvent, excellent, et même un peu plus, là – est complètement inséré dans la vie de ce village, jouant aux mêmes jeux et participant à la chasse, visiblement le passe-temps favori du coin. Son travail se situe au jardin d’enfant où il est souvent en relation avec Klara, la jeune fille de son meilleur ami, et dont il s’occupe particulièrement. Il s’avère que c’est elle qui, un jour, va dire à la directrice du jardin d’enfants que Lucas lui a montré son sexe. La machine s’emballe alors et, très vite, tout le village est au courant de l’affaire. En tant que spectateur, on sait qu’il ne s’est rien passé et on a pu voir furtivement ce qui a pu pousser la jeune fille à utiliser les termes qu’elle prononce et déclencher ce véritable bouleversement pour le personnage central mais aussi pour le village dans son ensemble. Surtout qu’en même temps, il doit gérer une nouvelle relation amoureuse ainsi que le désir de son fils de venir habiter chez lui. Cela fait que les problèmes se surajoutent aux problèmes déjà existants, ce que je trouve un peu dommage car cela a tendance à peut-être un peu diluer la question principale. Ainsi, il y a certains éléments que l’on aimerait voir creuser d’avantage, notamment dans sa relation aux autres. Pourquoi certains (peu) le soutiennent alors que d’autres le rejettent violemment.

Peu à peu, on va voir comment ses amis, puis le village en entier (ou presque) se coupe de Lucas. Il devient progressivement un paria qui n’a même plus le droit de venir faire ses courses dans le magasin. Thomas Vinterberg arrive très bien à saisir cette évolution progressive de la mentalité, en quelques scènes, parfois assez furtives et la façon dont un climat très sombre s’installe dans cette communauté. Surtout, qu’en même temps, il nous montre aussi la petite Klara qui dit qu’elle a dit des bêtises mais que ses proches soutiennent à maintenir ses dires. C’est cette alchimie assez complexe entre vérité et mensonge, entre adulte et enfant, très difficile à cerner et à mettre correctement en scène que le réalisateur saisit sans doute le mieux. Alors, c’est sûr que c’est un peu (voire très) dérangeant car la parole de l’enfant apparaît encore aujourd’hui comme sacralisée (même si l’Affaire d’Outreau a tout de même remis fortement cela en question). Le spectateur est un peu pris à témoin dans cette affaire et ce n’est pas la situation la plus confortable. Mais le cinéma est aussi-là pour se confronter à des problématiques complexes et « violentes ». Dans sa mise en scène (plus classique et posée que son premier film), Thomas Vinterberg a une petite tendance à être parfois un peu trop démonstratif en en rajoutant quelque peu Ainsi, certains plans auraient pu être évités comme l’enterrement du chien sous la pluie… Il fléchant aussi de façon trop marquée certaines situations. Mais, dans l’ensemble, il arrive à tenir de façon très correcte un sujet pas évident et à orchestrer quelques scènes très fortes (notamment celle de l’église). La fin, elle, est assez impressionnante dans sa rapidité et la façon qu’elle a de réintroduire une part de mystère et de remettre en perspective ce qu’on a pu voir juste avant. Non, après une telle affaire, plus rien ne sera jamais comme avant.



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