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TimFaitSonCinema
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BULLHEAD

Jacky Vanmarsenille est agriculteur dans le Limbourg. Il est aussi mouillé dans le trafic des hormones avec un vétérinaire corrompu. Alors qu’un policier enquêtant sur ces faits est abattu, le passé de Jacky refait surface…
Verdict:
Un long métrage très dur et puissant, qui marque avec force l’entrée d’un réalisateur très talentueux mais aussi d’un acteur assez incroyable. La première claque de 2012.
Coup de coeur:

La maitrise du réalisateur

La date de sortie du film:

22.02.2012

Ce film est réalisé par

Michael R. ROSKAM

Ce film est tagué dans:

Drame

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 La Critique


Bullhead est un film qui fait un certain bruit chez les différentes critiques depuis quelque temps et qui a vu son buzz renforcé par sa nomination à l’Oscar du meilleur film étranger (qu’il n’a finalement pas obtenu). En France, le cinéma belge est surtout vu à travers deux prismes : le premier est celui des frères Dardenne, souvent assez dur et montrant une Belgique en proie à la crise ; le deuxième est celui des comédies (et comédiens) souvent désopilant(e)s. Michael R. Roskam ouvre avec son premier film une nouvelle voie, vraiment intéressante qui lui est propre : celle d’un vrai drame, doublé d’une enquête policière, au cœur d’un paysage assez singulier qu’est celui de la campagne belge. Et c’est un coup de maitre car Bullhead est la première vraie claque cinématographique de 2012.

Le film commence par un plan flou de la campagne belge. Au fur et à mesure que la voix-off du personnage principal dit (en substance) : « on n’échappe jamais à son passé », le paysage devient net puis de nouveau flou. Ce plan, tout simple, nous plonge déjà dans une ambiance assez particulière et qui est le terreau de tout le long métrage. Celui-ci est souvent rythmé de plans du paysage de cette terre qui accueille l’intrigue principale (on voit assez peu les animaux en eux-mêmes). Car Bullhead est un film qui est inscrit au plus profond de la terre, dans un milieu, celui des agriculteurs, et plus précisément les engraisseurs de bêtes, que l’on connaît mal et qui peut sembler un peu étrange et décalé pour ce genre de films. On voit finalement assez peu le véritable métier de ces gens-là, mais plutôt ce qu’ils font d’illégal à côté pour arrondir leurs fins de mois. D’ailleurs, le ton est donné très vite avec une visite que rend le personnage principal à un agriculteur du coin.

Bullhead est un vrai film noir, qui a pour toile de fond le trafic d’hormones de croissance pour le bétail. C’est un long métrage où la traque des policiers pour retrouver les meurtriers d’un enquêteur est toujours en toile de fond et où les repas d’affaires succèdent aux tractations douteuses et aux arrangements louches. Tout cela dans une ambiance sombre et plutôt angoissante, où le jour est de moins en moins présent pour laisser place sur la fin à une nuit froide et sans vie. L’intrigue « policière » est doublée de l’histoire plus personnelle du personnage principal, avant que les deux ne se rejoignent et se confondent dans toute la dernière partie qui est vraiment très impressionnante. L’enquête en elle-même n’est pas vraiment montrée mais elle n’est pas non plus très compliquée et là n’est pas véritablement l’enjeu du film. C’est le personnage principal, ce Jacky, sorte d’« homme animal » qui est le cœur du film et qui polarise le tout. C’est un trentenaire au physique plus qu’imposant, bien installé dans cette mafia et est en passe de développer son « marché » en s’associant avec d’autres trafiquants. Ce personnage est vraiment montré comme un peu à part, solitaire et son physique est particulièrement mis en valeur. Son interprète, Matthias Schoenaerts est vraiment impressionnant dans ce rôle presque mutique où il impose une présence presque bestiale dans toutes les scènes où il apparaît.

Ce personnage est « expliqué » au cœur du film, dans un flashback assez impressionnant qui nous permet de comprendre son évolution et sa personnalité actuelle. La scène centrale du film est d’une violence brute assez incroyable et marque le spectateur pour longtemps. C’est avec ce passage tout le film qui s’éclaire d’une nouvelle façon et qui prend une nouvelle dimension avant de culminer dans un dernier quart d’heure qui brasse tous les enjeux développés pendant deux heures. Toute la fin est ainsi assez grandiose, bien que particulièrement pessimiste et sombre. Mais, pendant tout le long métrage, le réalisateur réussit à instiller une véritable tension de tous les instants. On a un peu toujours l’impression que les choses peuvent s’accélérer et se dénouer. Certaines séquences sont ainsi pleines d’une vraie force qui nous oblige à garder, en tant que spectateur, une vigilance de tous les instants.

Ce qui est très impressionnant, c’est la vraie maitrise de tous les éléments de la part du réalisateur. On peut avoir parfois l’impression qu’il en rajoute un peu (notamment dans son utilisation des ralentis) mais il ne laisse rien au hasard. Par rapport à différents aspects, ce film m’a un peu fait penser à Drive, le très bon film de Nicolas Winding Refn. Il y a notamment ce même travail sur la prise en compte et la mise en valeur du personnage central, sur les lumières et sur le rythme. Bullhead est en tout cas un film qui ne donne pas foi en la nature humaine et ses turpitudes, mais qui, par contre, est vraiment une source d’espérance en un cinéma éternel, qui permet toujours à de nouveaux réalisateurs de revisiter des genres tout en y apportant leur vraie touche personnelle. C’est pour cela que Bullhead rentre incontestablement dans la catégorie des premiers films qui marquent et le réalisateur, Michael R. Roskam dans celle des grands talents à suivre de très près.



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