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TimFaitSonCinema
9 / 20  (1)

TRISHNA

Dans le Rajasthan profond vit la jeune Trishna qui travaille dur pour sa famille. Lorsqu’elle rencontre un jeune homme fortuné qui lui offre un emploi dans son hôtel, c’est le début d’une histoire d’amour contrariée par le poids de la société…
Verdict:
Trishna est bien l’un des films les moins réussis de ces derniers temps. Mal réalisé mais surtout complètement superficiel dans ce qu’il veut montrer, ce long-métrage n’est même pas sauvé par Freida Pinto qui semble complètement perdue là au milieu. Pour un ratage, c’est un ratage…
Coup de coeur:

Non, vraiment…

La date de sortie du film:

13.06.2012

Ce film est réalisé par

Michael WINTERBOTTOM

Ce film est tagué dans:

Drame amoureux

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 La Critique


J’avoue que j’ai un faible pour tout ce qui touche au monde indien, et notamment quand c’est montré au cinéma. Les films qui se passent dans ce pays connaissent de surcroît en ce moment un regain de mode, sans doute en grande partie du au succès planétaire de Slumdog Millionaire. De nombreux réalisateurs, notamment britanniques, semblent trouver dans le fait de tourner en Inde une sorte de source de « jeunesse » pour leur cinéma car le paysage, l’ambiance ou les couleurs leur permettent de renouveler leur style sans trop prendre de risques. Bref, tout film sur l’Inde m’intéresse potentiellement. En plus, j’avais été assez troublé par le précédent film de Michael Winterbottom que j’étais allé voir, The killer inside me. Bien que « choqué » par ce long-métrage, j’avais trouvé la volonté du réalisateur vraiment intéressante et donc le geste cinématographique assez osé. Là, on sent clairement que Winterbottom voulait tourner en Inde puisqu’il adapte lui-même (il est scénariste ici) le « vieux »roman de Thomas Hardy, Tess d’Urberville, pour créer une histoire d’amour impossible dans la société indienne contemporaine. Mais le tout s’avère malheureusement être une véritable catastrophe.

Ce qui marque dans les dix premières minutes, c’est le côté très « découvrons l’Inde » qui se manifeste par une musique – que je qualifierais ici d’« indianisante » – omniprésente, beaucoup de plans sur des paysages, des visages, et tout cela en mouvement puisque c’est un véhicule (rempli de jeunes fortunés) qui nous « guide » à travers villes et campagnes. On se croirait vraiment dans les pubs pour les pays que l’on voit sur Eurosport avec le slogan à la fin : « Incredible India » ou « Come to Romania, it’s great ». Le spectateur se dit que c’est normal, que le réalisateur a besoin de bien ancrer son film dans ce contexte et que c’est un peu facile comme technique, mais que, bon, dix minutes, passe encore. On peut donc penser que ça va s’arrêter assez vite, mais non. Parce qu’en fait, c’est comme ça pendant tout le film. A la fin, on est vraiment à la limite de la nausée tellement ces mêmes images ou ces mêmes plans se répètent, avec toujours cette même musique de fond. En plus, Winterbottom fait presque toujours cela à travers les yeux d’un personnage sur un véhicule en mouvement (combien de fois voit-on Trishna pensive devant une vitre ?). En gros, la moitié du film ou presque est consacrée à ce genre d’images, ce qui les fait devenir tout simplement horripilantes après 90 minutes de ce que l’on peut considérer comme une longue publicité pour l’office de tourisme indien.

Le problème principal, c’est qu’avec ce déluge d’images d’« ambiance », le réalisateur cache en fait l’immense vide de son scénario. En effet, j’ai rarement un film où ce dernier était aussi ridicule et surtout creux. L’histoire en elle-même – une jeune fille de la campagne un peu naïve va vivre une histoire d’amour compliquée avec un riche héritier – n’est pas forcément absurde même si on est dans une forme de cliché un peu éculé. Mais, alors ce qu’en fait Winterbottom est incroyablement mauvais. S’il a choisi de déplacer en Inde un scénario déjà connu, on pouvait penser que c’était pour l’inscrire réellement dans une société assez particulière, faite de castes et de divisions en tous genres (ethniques, religieuses, linguistiques). Il y avait là un terreau vraiment intéressant à cultiver car, pour une histoire d’amour réussie, c’est quand même un peu la base de partir sur de grandes différences. Mais, dans le genre « zéro analyse du contexte », Trishna se pose sacrément là. Le film pourrait se passer au Groenland ou en Papouasie-Nouvelle-Guinée qu’il se déroulerait pareillement et c’est vraiment fou d’en arriver là alors qu’on a une telle base de travail et de réflexion qu’est l’Inde d’aujourd’hui. Quelques toutes petites pistes sont lancées, de façon imperceptible et ouvrent des portes qui pourraient être intéressantes. Mais celles-ci sont refermées aussi vite, comme si le scénario avait peur de se compliquer la vie. Le tout est en fait incroyablement superficiel. Le scénario semble juste survoler son sujet dans un univers qui n’est même pas vraiment pris en compte, si ce n’est pour son aspect foklorique, qui permet donc de faire quelques jolis plans (et, en plus, Winterbottom n’en réussit pas tant que ça…).

L’histoire d’amour, qui est quand même le centre névralgique du film et ce qui devrait le soutenir, est, elle, traitée de façon complètement ridicule. En même temps, les deux personnages principaux ne sont pas du tout fouillés. Ils agissent un peu de façon automatique, sans que l’on comprenne bien pourquoi. Les évènements s’enchaînent (ils se rencontrent, il l’invite dans son hôtel, il l’invite à Bombay, il l’abandonne plus ou moins, il revient,…) sans qu’il y ait le moindre soupçon d’explication ou de volonté de compréhension de ce qui se passe chez chacun de ces deux personnages. Ca se passe comme ça, parce qu’il faut que ça se déroule comme ça, et puis c’est tout. C’est notamment le cas pour ce personnage féminin qui est vraiment inintéressant au possible. Bien sûr, on peut dire qu’elle subit le poids de la société (et encore, ça se discute), ce qui l’empêche d’avoir une véritable mainmise sur sa propre vie. Mais, premièrement, le scénario ne montre jamais cette emprise sociale et, de plus, on pourrait attendre un minimum de rébellion chez cette femme qui se fait finalement complètement trimballer par un homme qui semble, lui, immature au possible. Ce « voyage » (tant géographique que mental) permet à la jeune femme de découvrir Bombay et ses fastes, le fait qu’elle aime vraiment danser et qu’elle est plutôt doué, mais aussi que les hommes sont « tous des salauds ». Grandes révélations en somme. Cette Trishna est interprétée par une Freida Pinto qui a l’air complètement ailleurs pendant tout le film. En même temps, son rôle est si peu intéressant que je comprends qu’elle s’en désintéresse un peu. Mais là, c’est quand même un peu choquant.

On croit avoir tout vu mais les cinq dernières minutes réussissent l’exploit d’être encore pire que les autres et font sombrer le film dans le pathétique avec une construction assez horrible qui fait se correspondre la prière que font des élèves (dont le frère et la sœur de Trishna) avec ce que va accomplir le personnage central lui-même (je n’en dis pas plus même si vous comprendrez bien vite). C’est confondant à la fois de cliché et de bêtise d’en arriver à un tel point d’impuissance dans la réalisation pour qu’il faille montrer les choses de façon si nette. C’est vraiment prendre le spectateur pour un demeuré, ce qui n’est jamais agréable pour ce dernier (en tout cas, moi, ça m’énerve prodigieusement). Ironiquement, le film se termine sur une image qui devient peu à peu tout blanche. Page blanche symbole que le long-métrage n’a pas vraiment commencé et que tout y est à écrire et à construire. Décidemment, Michael Winterbottom s’est raté à tous les points de vue pour Trishna. Espérons juste qu’il revienne à la raison et puisse refaire un film au moins correct, ça sera bien suffisant. Moi, je prendrai en tout cas.


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leila 22.09.2016, 00:12

Bien résumé !


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