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TimFaitSonCinema
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MOONLIGHT

Trois moments de la vie de Chiron, entre enfance et âge adulte. Au cœur d’un quartier pauvre de Miami, il doit se frayer un chemin dans un contexte plus que compliqué. Entre un milieu familial délétère et une scolarité où il n’est pas accepté par les autres élèves, Chiron va devoir apprendre à se construire en tant qu’homme, avec toute sa personnalité…
Verdict:

Moonlight est un long métrage qui met un peu de temps à démarrer, notamment du fait d’une réalisation assez agaçante, et qui monte en puissance pour culminer dans une dernière partie vraiment intense. Barry Jenkins a le mérite de s’attaquer frontalement et sans se défiler à des sujets pas évidents. Cela valait-il pour autant un Oscar du Meilleur Film ? Je suis franchement bien plus partagé.

Coup de coeur:

La dernière demi-heure

La date de sortie du film:

01.02.2017

Ce film est réalisé par

Barry JENKINS

Ce film est tagué dans:

Drame Oscar du Meilleur film

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 La Critique


Pour être tout à fait honnête, j’ai conscience de passer un peu après la « bataille » pour ce film. Il est sorti il y a presque deux mois en France et, pendant cette période, beaucoup de choses ont changé pour ce long métrage. En effet, si, début février, il avait déjà fait parler de lui, à travers sa présentation dans différents festivals (notamment Telluride ou Toronto, particulièrement prisés aux Etats-Unis) mais aussi son Golden Globe obtenu dans la catégorie Meilleur film dramatique, il n’avait pas encore eu un véritable écho, notamment chez nous. Cet état de fait a forcément été modifié par son Oscar du Meilleur film obtenu à la fin du mois. Sans parler des circonstances assez incroyables de l’obtention de cette récompense (et cette rocambolesque gaffe qui a finalement autant gêné le vainqueur que le « vaincu » La La Land), cela lui a donné une « seconde carrière » et, alors que le compteur d’entrées en France s’était arrêté sous les 300 000 avant la cérémonie, il est reparti à la hausse pour tranquillement dépasser les 500 000 à l’heure actuelle. C’est d’ailleurs grâce à ces séances supplémentaires que j’ai pu le découvrir, et je remercie le cinéma de Morestel de programmer ce genre de films, surtout que j’étais tout seul dans la salle… Vous vous demandez sans doute pourquoi je vous raconte toute cette histoire ? Et bien tout simplement parce qu’elle est loin d’être neutre dans la manière que j’ai eu d’aborder mon visionnage de Moonlight. Car, quoi qu’on puisse dire, on ne va pas visionner de la même manière un film qui a eu l’Oscar du Meilleur film (ou même qui est nominé, d’ailleurs) et un long métrage « lambda ». C’est d’ailleurs la même chose pour la Palme d’Or. Et, forcément, mon jugement est orienté par cette récompense, ce que je regrette presque un peu…

 

Comment aurais-je réagi si j’avais vu Moonlight au moment de sa sortie ? C’est une vraie question à laquelle je vais finalement essayer de répondre dans cette critique, même si ce n’est évidemment pas facile… D’autant plus que le premier quart d’heure ne m’a pas rassuré plus que ça. Rien que le premier plan, tout à l’esbroufe (un seul mouvement d’une caméra qui ne s’arrête jamais de bouger) m’a quelque peu agacé. On sent d’entrée de jeu que Barry Jenkins essaie d’imposer une pate personnelle dans la mise en scène mais qu’il n’arrive pas (ou ne cherche pas, d’ailleurs) à faire dans l’épure. Heureusement, au fur et à mesure que le film avance, la réalisation se fait plus posée, parfois presque contemplative, même si, franchement, je n’ai pas été renversé par la beauté de l’image. Il y a de jolies séquences, un beau travail sur la lumière, quelques idées de mise en scène pas idiotes mais  rien de révolutionnaire. Là où Moonlight est finalement vraiment intéressant, c’est dans sa construction en trois actes (nous reviendrons sur cette notion un peu plus tard), qui correspondent à différents âges de Chiron, tous trois très importants dans sa construction en tant qu’individu. Du petit enfant qu’un dealer au grand cœur prend sous son aile au dealer lui-même qui veut se retrouver, se trouve également l’adolescent qui commence à comprendre vraiment qui il est.  Et ce qui est bien, c’est que cette progression chronologique est également dramatique et émotionnelle. En effet, plus le film avance, plus le destin de Chiron devient prenant et émouvant, pour culminer dans une ultime partie et surtout cinq dernières minutes magnifiques. En ce sens, Moonlight est un vrai film d’apprentissage, où le personnage central doit à la fois se battre contre ce qui semble être une fatalité familiale mais aussi contre l’homophobie ambiante. C’est un long métrage qui donc est à la fois fortement dénonciateur mais également porteur d’espoir.

 

Le scénario n’hésite pas à poser de vraies questions, par exemple sur le mythe de l’homme fort et sur l’homophobie dans la culture noire-américaine, et notamment celle de ces quartiers un peu abandonnés et qui ressemblent vraiment à des ghettos modernes (ici, à Miami). Pourtant, en même temps, l’histoire ne tombe pas dans les clichés que l’on aurait pu attendre pour ce genre de films : celui du misérabilisme (le personnage de la mère est assez vite expédié), ou celui des armes à feu qui conduisent à la mort (même si on peut l’imaginer dans les deux longues ellipses). Au niveau du scénario, ce qui m’a un peu plus dérangé, c’est la construction même car on sent un peu trop que ce film est adapté d’une pièce de théâtre. Si les actes sont fléchés de manière évidente, je trouve que c’est également un peu trop le cas pour les scènes, qui sont autant de dialogues qui se succèdent. Peut-être l’ensemble manque-t-il un peu de « liant ». Finalement, on peut s’interroger sur le fait que ce long métrage ait remporté l’Oscar du Meilleur film. Forcément, on ne peut pas négliger le fait que cette récompense soit décernée un an après la grosse polémique sur l’absence de noirs dans les nominations et leur faible représentativité dans l’Académie qui remet les Oscars, et un mois après la prise de pouvoir officielle de Donald Trump. Est-ce donc uniquement un Oscar politique ? Loin de moi l’idée de dire que c’est un mauvais film, mais il me semble que de nombreuses œuvres lui étaient supérieures cette année, rien que dans la liste des nominés. Moonlignt a ses qualités, qui ont pu séduire l’Académie, mais, selon moi, un certain doute subsiste. Et je trouve presque cela dommage car on ne peut plus voir le film de la même façon et j’ai sans doute eu tendance à le juger un peu plus durement qu’un autre. Je m’en excuse et j’attends avec impatience le prochain long métrage de Barry Jenkins, espérant pouvoir m’en faire une idée sans aucun a priori.




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