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JIMMY’S HALL

Jimmy Gralton revient dans son Irlande natale, après dix années d’exil et son pays a bien changé puisque après la guerre civile, plus de libertés semble être un horizon possible. Il est là pour aider sa mère dans la ferme familiale mais, poussé par la jeunesse locale, il va rouvrir une sorte de foyer où l’on danse et étudie. Au risque de réveiller les vieilles tensions avec l’Eglise, notamment.
Verdict:

Ken Loach livre un film formellement plutôt réussi. C’est proprement et joliment réalisé. Néanmoins, le tout manque clairement de souffle, notamment du fait d’un acteur principal qui manque un peu charisme et d’un discours parfois un peu trop manichéen. On a connu un Ken Loach plus incisif.

Coup de coeur:

Les paysages irlandais

La date de sortie du film:

02.07.2014

Ce film est réalisé par

Ken LOACH

Ce film est tagué dans:

Drame historique

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 La Critique


Ken Loach a annoncé (dans un premier temps, avant de revenir sur sa décision) qu’il arrêterait sa carrière après ce nouveau film, encore sélectionné à Cannes cette année (mais reparti bredouille, ce qui est très rare pour celui qui a déjà gagné une Palme et trois Prix du Jury). On peut considérer Jimmy’s Hall comme une sorte de suite à Le vent se lève (le film qui lui avait d’ailleurs permis de remporter la Palme), que j’avais beaucoup apprécié en son temps. En effet, si le long métrage de 2006 traitait de la guerre d’indépendance et de la guerre civile qui eut lieu en Irlande dans l’immédiat après-première guerre mondiale, celui de 2014 prend sa suite dix années après mais des textes introductifs nous mettent directement dans cette ambiance et plusieurs passages en flashbacks nous montreront cette époque qui explique le départ de Gralton mais aussi tous les soucis qu’il va connaître lors de son retour. Pour Ken Loach, c’est un retour au film historique et à un long métrage un peu plus dramatique, comme pour continuer sa récente alternance entre œuvres plus engagées (It’s a free world ou Route Irish) et celles plus légères (Looking for Eric ou encore La part des Anges). On sent que le réalisateur a besoin de souffler un peu et qu’il ne peut plus enchainer comme avant ce qui pouvait s’apparenter à de véritables charges, notamment autour des questions sociales. D’ailleurs, Le vent se lève avait provoqué beaucoup de polémiques en Grande-Bretagne, notamment du fait de la représentation des forces britanniques en Irlande et leur violence supposée. On aurait pu penser que Jimmy’s Hall, en continuant en quelque sorte cette histoire et en s’intéressant au seul personnage qui, dans l’histoire, a été déporté d’Irlande, serait dans une veine assez politique et revendicatrice. Pourtant, ce n’est pas vraiment le cas et Ken Loach livre un long métrage qui, bien que pas désagréable, est un peu trop plat pour vraiment séduire.

 

L’histoire de ce Jimmy Gralton est plutôt « jolie » ou, en tout cas, Ken Loach veut nous la conter sous cet angle. En choisissant de façon assez délibérée de ne pas nous montrer le côté vraiment « combattif » de cet homme, ce dernier apparaît seulement ici comme une sorte de leader qui, poussé par les jeunes du coin et aidé par ses anciens amis, va remettre sur pied une sorte de salle polyvalente où, gratuitement, des cours de différentes natures sont dispensés. Ce qui est d’ailleurs assez curieux, c’est que, dans toutes les scènes qui se déroulent dans ce lieu (en rénovation ou en fonctionnement), ce Jimmy Gralton se fond finalement dans la foule et n’est plus qu’un parmi d’autres. C’est une certaine vision du collectif (cher à Loach) mais, étant donné le poids historique de cette figure, c’est un choix scénaristique assez étonnant qui nous interroge un peu sur le véritable objet de ce film qui, finalement, ne semble pas tant que cela s’intéresser à son sujet de départ. Ce n’est d’ailleurs pas la seule décision étrange car, dans l’ensemble, je n’ai pas trouvé le film très bien écrit, notamment dans cette exposition assez bizarre qui oblige à de nombreux textes explicatifs et à des retours parfois un peu laborieux dans le passé. Peut-être l’histoire aurait-elle du simplement commencer plus tôt et faire un saut de dix ans. L’efficacité dramatique n’en aurait été que plus grande. De plus, comme souvent chez Ken Loach, le discours a un côté assez didactique avec de nombreux dialogues parfois un peu plats car trop explicatifs. D’ailleurs, cela donne à l’ensemble un aspect parfois dangereusement manichéen même si, pour une fois, l’Eglise n’est pas complètement montrée du doigt puisque, avec ses deux curés très différents (un vieux et un jeune), ce sont aussi deux façons de penser qui s’affrontent. Mais cela garde un côté binaire parfois un peu dérangeant.

 

Ainsi, Jimmy’s Hall n’est pas exempt de quelques longueurs, notamment lors de ces discussions entre protagonistes qui, si elles apportent des éléments sur le fond, sont, sur la forme, pas assez bien mises en valeur. Cela vient peut-être aussi du fait que le personnage central, interprété par Barry Ward, un acteur irlandais pas vraiment connu, n’est pas vraiment charismatique et ne permet en tout cas pas au spectateur une sorte d’identification qui lui permettrait de plus s’accrocher à lui. On le trouve tour à tour sympathique ou intelligent mais jamais véritablement émouvant. Clairement, Ken Loach et son scénariste habituel Paul Laverty ont fait le choix d’apporter un peu de légèreté à l’ensemble en créant au milieu de cette histoire une petite romance qui ne mange pas de pain et qui, pour le coup, est plutôt pas mal construite car justement assez finement amenée. De plus, ils n’hésitent pas à aller vers l’humour presque un peu farcesque comme lors de cette course poursuite avec des policiers bloqués dans la propre maison de Gralton. Cela donne une jolie histoire, pas forcément très forte, ce qui est un peu étonnant de la part d’un Ken Loach que l’on aurait pu penser un peu plus dans le registre du « combat » avec un tel sujet de départ. Dans sa réalisation, il n’en fait pas trop et livre un long métrage sur la forme assez classique et techniquement réussi. Il n’y a de ce côté-là pas grand-chose à redire. Le seul souci, c’est que ce Jimmy’s Hall manque d’un peu plus de chair et d’émotion pour que l’on s’y intéresse vraiment davantage et que le combat de cet homme, qui l’a obligé à un double exil (dont le dernier fut définitif), soit plus mis en valeur. Sur une autre figure irlandaise, Bobby Sands, Steve McQueen nous avait offert un film bien plus fort (Hunger) car les choix étaient vraiment radicaux. Là, c’est beaucoup moins le cas.




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