La Critique
Depuis 2006 et la sortie de Nos jours heureux, comédie plutôt réjouissante sur les colonies de vacances, les deux compères Toledano et Nakache se sont vraiment faits un nom dans l’univers de la comédie française. Il faut bien dire qu’ils y apportent quelque chose de nouveau, une sorte de fraîcheur, qui permet à leurs films d’être des comédies qui relèvent plutôt la moyenne française. Tellement proches, film sur les rapports familiaux pas toujours évidents, avait confirmé cette faculté. Mais avec Intouchables, les deux réalisateurs vont plus loin, beaucoup plus loin, en proposant une comédie vraiment extraordinaire qui se place d’emblée comme un must de ces dernières années.
Le sujet du film est à la fois très simple et très compliqué. Simple parce que c’est l’histoire (vraie) d’un riche tétraplégique qui choisit pour s’occuper de lui quelqu’un très loin de son milieu. Mais le film va bien au-delà et permet de traiter un grand nombre de problèmes de société, notamment autour du handicap, de façon très intelligente et pertinente. Là où beaucoup de réalisateurs, avec un sujet qui est tout de même assez casse-gueule, auraient raté leur film, Toledano et Nakache arrivent justement à tirer ce sujet vers un long métrage à la fois énergique mais aussi très intelligent. Rien n’est laissé au hasard et, sous des dehors de comédie légère, le film pose de nombreuses questions et y répond à sa façon.
Sa façon, c’est avant tout l’humour, et le très bon humour, il faut le dire tout de suite. Toutes les répliques ou presque font mouche. Que ce soit du comique de situation, de répétition ou juste des jeux de mots, il y a une vraie inventivité et on ne s’ennuie jamais. Un grand nombre de répliques et de séquences risquent bientôt de rentrer dans le langage courant. Les scénaristes ont réussi à faire rire de tout, même de choses parfois assez horribles, sans que ce soit ni lourd, ni surfait. A ce niveau-là, c’est du très grand art. Mais ce film ne fait pas seulement rire, il arrive aussi à dépeindre en quelques séquences des problèmes assez vastes comme la jeunesse dans les cités ou la solitude du handicap. Le ton est toujours juste et sensible. Ce qui est très important, c’est que rien dans le film n’est gratuit : toutes les scènes drôles ont un sens plus tard dans le long métrage. Quelques clichés subsistent mais on les oublie assez vite, noyés qu’ils sont dans un scénario vraiment fin. La première séquence est en ce sens assez exceptionnelle. Elle est une sorte de résumé de ce que sera le film : un grand écart constant entre différents sentiments et aussi une sacré tranche de rigolade.
Ce film raconte donc surtout la relation entre deux personnages que tout oppose : Phillipe, ce riche aristocrate handicapé qui change d’assistant toutes les semaines et Idriss, ce jeune des cités qui vient à l’entretien d’embauche uniquement pour toucher les allocations chômages. De cette rencontre improbable, les réalisateurs ne font jamais quelque chose d’absurde car, finalement, sous leur caméra, cela semble assez évident, et beau. Pour interpréter ce duo, Toledano et Nakache ont sorti le grand jeu en réunissant François Cluzet et Omar Sy. Ce dernier dépasse grâce à ce film bien le simple cadre du Omar que tout le monde connaît dans son duo avec Fred. Il est drôle, bien sûr, mais il offre aussi une vraie palette d’émotions à son personnage. Et que dire de François Cluzet, si ce n’est qu’il confirme une nouvelle fois qu’il est bien un immense acteur du cinéma français. Courez voir ce film, il le mérite et vous ne le regretterez pas !
REVU LE 05/11/2011