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TimFaitSonCinema
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BIRDMAN

Riggan Thomson est un acteur qui, vingt ans auparavant, était mondialement connu pour son interprétation du super héros Birdman. Aujourd’hui, il est un peu tombé dans l’oubli et essaie de monter une pièce à Broadway pour se refaire. Mais il va devoir affronter tout une série de problèmes avant que la première ait lieu...
Verdict:

Porté par un Michael Keaton assez incroyable et une réalisation très souvent brillante, Birdman ne peut pour autant pas prétendre être l’immense film attendu du fait d’un fond un peu moins passionnant. C’est dommage car la performance technique et artistique est quand même exceptionnelle et donne au film un caractère unique et inoubliable.

Coup de coeur:

Le style général

La date de sortie du film:

25.02.2015

Ce film est réalisé par

Alejandro González IÑÁRRITU

Ce film est tagué dans:

Drame Oscar du Meilleur film

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 La Critique


Forcément, quand on va voir un film alors que l’on sait qu’il a obtenu l’Oscar du meilleur film, ça a tendance à quelque peu changer la donne. Et cela pour au moins deux raisons. La première, c’est que, forcément, on entend beaucoup parler du long métrage, on sait à peu près ce qui va se passer et comment c’est fait. Pour le coup, là, ce n’est pas trop grave car, avant même qu’il gagne l’Oscar, je savais déjà globalement à quoi ça ressemblait. Mais le plus embêtant, c’est surtout que l’on ne peut pas s’empêcher de regarder le film en se demandant toujours ce qui a fait qu’il a remporté la statuette, notamment par rapport à d’autres que l’on a vu précédemment et qui avaient pu nous plaire. Ainsi, le visionnage est globalement beaucoup moins « naturel ». Mais bon, c’est ainsi, on n’a pas bien le choix. De toute façon, ce long métrage me donnait vraiment envie car Iñárritu est un réalisateur que j’estime beaucoup. En effet, son 21 Grammes est l’un de mes plus grands souvenirs au cinéma. Dans une petite salle, un soir assez tard, je me souviens avoir pris une sacrée claque : un récit déstructuré au possible, des histoires fortes, un style visuel vraiment particulier… Et, depuis, je l’ai revu plus d’une fois et il m’a toujours fait autant d’effet. J’ai par contre été beaucoup moins convaincu par ses deux longs métrages suivants : Babel était formellement plutôt réussi (avec ces styles différents pour chacun des segments) mais il manquait un vrai lien entre toutes ces histoires. Biutiful, par contre, était une vraie déception, avec un scénario beaucoup trop simpliste et une réalisation où les défauts prenaient le pas sur les qualités. Mais là, j’avais le sentiment, notamment en voyant la bande-annonce, que le Iñárritu inventif était bien de retour. Et alors, c’est vraiment le cas ?

 

Honnêtement, ce film me pose un petit problème car, pour en parler, il est quand même nécessaire de faire quelque chose normalement proscrit : une dissociation très nette entre la forme et le fond. Oui, je sais, les deux sont liés et c’est la dernière chose à faire de les traiter séparément (même si j’avoue que c’est quand même souvent le cas dans mes critiques), mais là, franchement, je ne vois pas bien comment faire différemment. Pourquoi ? Parce que, en fait, Birdman est un film qui, formellement, ne ressemble à presque rien d’autre alors qu’il traite finalement de sujets sur lesquels on a déjà vu de nombreuses variations. En effet, c’est un long métrage qui traite directement de la question des acteurs, de leur rapport à une certaine réalité et, là particulièrement, de la manière qu’ils peuvent avoir de se relever après avoir été oublié ou de cette difficulté à changer de registre (ancien personnage principal d’un film de super-héros, lui veut trouver une crédibilité en tant qu’acteur et metteur en scène de théâtre). Ainsi, on a derrière toutes les questions que cela pose : le rapport à la critique, aux autres acteurs, à une certaine folie,… Ce ne sont pas des thèmes si originaux que cela et Birdman a quand même une petite tendance à avoir un discours un peu « simpliste » (cinéma à gros budget vs cinéma d’auteur, critique forcément acerbe,…) et on aurait envie que le film aille un peu plus loin dans ces réflexions, ce qui est un peu frustrant. Forcément, cela donne quelques répliques qui valent le détour avec le système hollywoodien qui en prend quand même largement pour son grade (merci Edward Norton, particulièrement en verve). Mais il y a aussi quelques longueurs à certains moments, malgré une galerie de personnages secondaires assez étonnante. De plus, le personnage principal manque un peu de nuance à mon goût pour incarner quelque chose de plus puissant. Pourtant, l’acteur qui l’interprète (avec brio, d’ailleurs), Michael Keaton, a connu à peu près la même trajectoire (de Batman à un oubli certain), ce qui aurait du rendre encore plus crédible tout le discours du long métrage.

 

Mais si Birdman est quand même un film assez fascinant, c’est parce qu’il est le fruit d’une idée de réalisation un peu folle : celle de faire presque deux heures en un seul et même long plan-séquence (même si, je vous rassure, il y a des artifices pour effectuer des coupes…). C’est assez amusant car, justement, dans ses films précédents (et surtout 21 grammes), la principale force du film se trouvait justement dans un montage très morcelé, que le spectateur devait presque reconstituer lui-même. Pourtant, l’histoire se déroule sur plusieurs jours mais on a néanmoins toujours la sensation d’être dans un seul et même flot où tout se mélange : la vie d’artiste avec ces répétitions de la pièce et la vie privée avec tous les questionnements qui suivent. Et le tout se passe dans différents lieux avec, tout de même, une grande importance donnée au théâtre où la pièce va se jouer, dédale d’escalier et de couloirs où cette réalisation fluide prend pas mal de son sens. Ce que l’on peut dire, c’est que ce long plan séquence ne se fait pas à l’ « économie », loin de là. En effet, ça bouge tout le temps – parfois de façon un peu forcée – mais c’est quand même assez souvent brillant, notamment dans cette manière de donner l’illusion que le temps et l’espace ne font qu’un (montrant donc de façon claire l’une des caractéristiques majeures du cinéma, celle de pouvoir « inventer » lieux et temporalités) mais aussi que le réaliste et le fantastique peuvent cohabiter. Et là, il faut rendre hommage au travail assez énorme d’Emmanuel Lubezki, le directeur de la photographie, à qui l’on doit aussi par exemple l'image de The Tree of Life ou Gravity (autant dire qu’on savait qu’il tenait la route !). Il réussit à orchestrer tout cela avec talent, gérant brillamment le rythme et l’espace, le tout avec une bande-son assez étonnante (de la percussion, principalement). C’est vraiment le genre de performance technique que l’on voit très rarement et, en ce sens, Birdman est nécessairement un film marquant. C’est juste un peu dommage que le propos ne soit pas aussi puissant… Un Oscar qui peut se discuter mais qui couronne quand même un long métrage étonnant.




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