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TimFaitSonCinema
Keita est un jeune garçon de six ans qui vit avec ses parents dont le père, Ryota, est un architecte très porté sur la réussite de son enfant. Un jour, cette famille apprend par la maternité où Keita est né que deux nourrissons ont été échangés à la naissance… Comment vont se passer les retrouvailles avec leur fils biologique, élevé dans une famille plus modeste ?
Verdict:
Très juste et émouvant par moments, Tel père, tel fils se caractérise surtout par la grande efficacité de sa mise en scène. Ça manque peut-être un peu d’émotion mais c’est du cinéma sans effets comme on aime en voir.
Coup de coeur:

La pureté de la réalisation

La date de sortie du film:

25.12.2013

Ce film est réalisé par

Hirokazu KORE-EDA

Ce film est tagué dans:

Drame familial

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 La Critique


En France, le cinéma asiatique n’est pas forcément celui qui connaît le plus de succès auprès des distributeurs et du public en général. Peu de longs métrages venant de ce continent sortent sur nos écrans et encore moins à « grande échelle » (au moins une centaine de salles dans le pays). Pourtant, quelques réalisateurs tirent leur épingle du jeu et ont réussi avec le temps à s’ouvrir les portes des festivals (notamment celui de Cannes). Cela leur a permis aussi d’avoir une meilleure exposition dans la presse spécialisée. Si, du côté chinois, c’est Jia Zhang-Ke qui représente le mieux cette réalité (notamment avec son dernier A touch of sin), pour ce qui est du Japon, on a l’équivalent avec Hirokazu Kore-Eda dont tous les films ont été distribués chez nous et dont quatre sur les sept derniers ont été présentés à Cannes (en compétition officielle ou dans la sélection Un Certain regard). C’est notamment le cas pour Tel père, tel fils, son dernier long métrage qui est reparti de la Croisette avec le Prix du Jury (sorte de médaille de bronze). Steven Spielberg, Président de ce jury, dit l’avoir particulièrement apprécié et en aurait même acheté directement les droits pour en produire un remake américain (ce qui ne présage pas forcément de quelque chose de bon, d’ailleurs). Chez nous, le scénario de Tel père, tel fils ne peut que nous faire penser à un long métrage (La vie est un long fleuve tranquille) resté assez longtemps mythique pour moi, même si l’avoir revu il y a assez peu de temps m’a clairement fait changer d’avis (je n’ai même pas pu le finir…). Celui-ci raconte globalement la même mésaventure, mais dans un style très différent puisque c’est clairement le registre de la comédie qui y est utilisé. Kore-Eda, lui, nous offre un vrai drame familial, juste et efficace, qui manque peut-être d’un peu d’émotion pour être encore plus réussi.

Plus que le côté « amusant » d’une situation à la fois extraordinaire dans ce qu’elle implique mais finalement plus plausible que ce que l’on pourrait croire, le réalisateur japonais cherche plutôt à montrer les rouages de la paternité et la manière dont se construit la relation entre le père et le fils. En effet, c’est réellement la question centrale de tout le long métrage et notamment celle de savoir si la paternité se trouve plus dans les liens du sang ou bien dans la classe sociale dans laquelle l’enfant est éduqué. Les deux pères « confrontés » ici sont extrêmement différents (l’un est un architecte débordé de travail et l’autre tient un magasin et a beaucoup plus de temps pour ses enfants) et ce sont à travers eux des visions du Japon d’aujourd’hui qui sont mises en parallèle (et pas forcément en opposition, et c’est là que le film est intéressant), notamment dans leur rapport à la société de consommation. En ce sens, Tel père, tel fils est aussi un témoignage presque documentaire vraiment intéressant sur une société nippone à la fois en évolution mais aussi très ancrée dans des traditions millénaires. Chacun à leur manière, ces deux pères représentent (sans doute de façon un peu trop caricaturale) deux façons d’être très différentes par rapport aux enfants : le premier est plutôt distant et mise beaucoup sur la réussite sociale qui passe par une éducation stricte alors que le second est bien plus « libéral » par rapport à son fils. Différentes séquences mettent bien ces deux visions en perspective et on comprend bien les difficultés pour accueillir l’ « autre » enfant chez soi. Si je parle de paternité, c’est bien parce que ce sont surtout les pères qui sont déterminants ici. Pourtant, les femmes ne sont pas reléguées à un rang inférieur mais leur caractère est plus proche et elles se ressemblent finalement davantage. On sent bien que c’est encore une société où les hommes ont encore un pouvoir très fort.

Avec ce sujet finalement assez délicat quand on veut le traiter de cette manière, Kore-Eda offre un vrai drame où il prend d’abord le temps de poser les choses en nous exposant la façon de vivre de chacune des familles. De toute façon, pendant tout le film, cette manière de ne pas brusquer les événements est une vraie constante. Il ne se passe finalement pas grand-chose mais absolument rien n’est laissé au hasard et tout a un sens. Il organise ses plans comme de véritables tableaux où tout est important (premier comme arrière plan). En ce sens, on peut parler d’une vraie justesse dans la réalisation. Sa mise en scène est marquée par l’absence d’effets de style et donc par une sobriété parfois étonnante. Cela est renforcé par le choix d’une musique particulièrement dépouillée (piano seul et particulièrement les Variations Goldberg de Bach) qui prend tout son sens par rapport aux images et à l’histoire globale. Kore-Eda a aussi une manière de très bien trouver la distance avec ses personnages principaux, ce qui permet au spectateur de ne pas se sentir voyeur d’une situation compliquée. Les acteurs principaux réussissent très bien à retranscrire la façon d’être de chacun des personnages et leur manière différente de réagir face à ce drame. Mais cette efficacité dans un certain dépouillement de mise en scène a aussi une petite contrepartie qui est parfois un côté presque un peu désincarné de cette histoire et des relations qu’elle implique. Ça manque un peu de vie, tant la mise en scène est maitrisée. Ce n’est pas tant un problème en soi car c’est un des aspects de l’existence du couple que l’on voit le plus mais, au niveau de l’émotion globale que procure ce long métrage, c’est un peu plus dérangeant. Lors de la dernière demi-heure, notamment, on sent toujours que l’émotion est à fleur de peau mais elle ne se dévoile jamais complètement, ce qui est un peu dommage. Je pense que c’est aussi une volonté du réalisateur de ne pas tomber dans une forme de sensiblerie mais à trop tout retenir, le film pêche un peu de ce côté-là. Il n’en reste pas moins que Tel père, tel fils reste un long métrage de qualité.


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vuvu 10.01.2014, 22:28

Ce film est génial ! Nous sommes derrière la caméra avec le petit Keita qui filme cette histoire, c'est très réussi.
La manière d'exprimer les sentiments, l'essentiel des dialogues, les silences, tout est plein de pudeur.
Cette délicatesse enveloppe à merveille le sujet particulièrement sensible ici : les liens de parenté.


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