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TimFaitSonCinema
De son village en plein cœur de l’Afrique du Sud jusqu’à son accession à la Présidence de la République, presque soixante-quinze ans se sont écoulés. Ce sont ceux-ci que nous propose de revoir ce film à travers les vies publique et personnelle de cet homme exceptionnel.
Verdict:
Un portrait bien trop rapide d’un homme qui a eu une vie incroyable et qui est résumée ici avec des partis-pris parfois discutables. Idris Elba donne quand même à Mandela une vraie consistance mais ça ne peut pas suffire.
Coup de coeur:

Idris Elba

La date de sortie du film:

19.12.2013

Ce film est réalisé par

Justin CHADWICK

Ce film est tagué dans:

Biopic

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 La Critique


Forcément, ce Mandela (on va faire court) ne peut pas se visionner maintenant sans penser au fait que le héros de la lutte contre l’apartheid est depuis décédé. D’ailleurs, l’avant-première du film a eu lieu à Londres au moment même où Mandela est mort, ce qui renforce encore un peu plus l’aspect assez étrange que revêt aujourd’hui ce film. C’est évidemment un hasard total et on ne peut pas accuser les producteurs d’un quelconque opportunisme, surtout que ce projet est porté depuis presque vingt ans par son producteur. En effet, lors de la sortie de l’autobiographie de Mandela, Anant Singh a été l’un des premiers à le lire et en a pris les droits pour le cinéma. Il a ensuite fallu monter ce film, trouver des financements, un réalisateur (ce sera Justin Chadwick, à qui l’on doit Deux sœurs pour un Roi), des acteurs,… Ce fut aussi « un long chemin » et c’est pourquoi le film ne sort que maintenant, au moment où son personnage principal est décédé et n’a pu voir que des extraits du long métrage. Cette coïncidence est simplement troublante et induit un biais inévitable qu’il faut essayer de dépasser dans le visionnage de ce film qui est un vrai biopic, dans la plus grande tradition (peut-être même un peu trop, nous y reviendrons). Ce qui est assez étonnant, c’est que si beaucoup d’hommes célèbres du Vingtième siècle ont eu droit à des films, presque aucun n’ont été fait du vivant de cette personne. Sauf dans le cas de Mandela, qui a vu sa vie adaptée au cinéma dans trois films et un téléfilm avant cette nouvelle version. Sur ceux-ci, j’en ai vu deux (Goodbye Bafana et Invictus) qui avaient fait le choix de ne s’intéresser qu’à une partie spécifique de la vie de l’homme (les années d’’emprisonnement pour le premier et la Coupe du Monde de Rugby 1995 pour le second). A l’inverse, le choix fait ici est de nous donner une vision bien plus générale et c’est là que, selon moi, se situe le problème de ce film.

Comme dit précédemment, et par rapport à tout ce qui a été filmé sur Mandela, ce nouveau film peut vraiment être considéré comme celui qui est le plus proche de l’homme. En effet, c’est à partir de ses propres Mémoires (qui s’intitulent comme le film) que le scénario a été écrit (par celui qui s’était occupé de Gladiator, par ailleurs). D’une certaine façon, il est donc assez logique que tous les grands épisodes de la vie de Mandela soient repris, de sa jeunesse comme avocat, à son accès à la Présidence, en passant par son emprisonnement durant lequel il est vraiment devenu célèbre. Pourtant, une telle démarche pose deux au moins deux questions. La première, qui n’est peut-être pas si importante (encore que), est celle de la recherche avec ce film d’une certaine sincérité. En effet, c’est bien la vision de Mandela lui-même qui est donnée et si tout n’est pas forcément rose dans sa vie (son rapport aux femmes, son rôle de père), les côtés négatifs sont largement mis de côté et traités comme de simples anecdotes. Savoir si cela ne doit être considéré qu’à ce simple niveau n’est peut-être pas nécessaire mais, sur le principe, ça me dérange quand même un peu par rapport à la pure objectivité du projet. Mais, au fond, d’un côté uniquement cinématographique (même si pour les biopics, réalité et fiction sont toujours liés), c’est plutôt la deuxième question qui m’intéresse car elle pose bien le souci majeur que j’ai eu avec ce film : quel est le point de vue adopté, voire, y’a-t-il un point de vue au cours du film ? Clairement, le sentiment laissé à la fin de la séance est que, justement, il y a un vrai manque de ce côté-là. A force de « tout » vouloir montrer – la vie personnelle comme l’action publique –, certains points ne sont qu’évoqués et survolés rapidement. Et c’est tout de même un peu gênant.

N’aurait-il pas fallu partir d’un point de départ clair, quitte à revenir ensuite sur des éléments importants qui permettent de comprendre les enjeux ? Dans le cas d’une vie comme celle-ci, c’est sans doute préférable car, en deux heures et demie, on ne peut aborder autant de sujets en étant au moins précis sur les points sensibles. C’est notamment le cas sur la période qui suit sa libération et qui précède son élection. C’est le sujet de toute la dernière partie du film mais je trouve vraiment que c’est passé en revue de manière bien trop rapide. C’est à ce moment-là que la personnalité de Mandela, son charisme et son influence politique sont déterminants et vont s’imposer à ses compatriotes. On reste sur notre faim par rapport à cette évocation de quatre ans qui changent véritablement le pays. Au moins, ce Mandela est rythmé (en même temps, si ce n’était pas le cas, ça serait inquiétant) et permet de retracer les grandes lignes de sa vie. Certains passages sont quand même émouvants, surtout parce que la vie de cette légende ne peut laisser indifférent. C’est filmé de manière honnête même s’il y a un peu trop d’effets de réalisation à mon goût (des ralentis inutiles et une volonté d’esthétiser parfois un peu outrancière) mais c’est beaucoup trop lisse et calibré pour revêtir un réel intérêt. Dans le rôle de Mandela, je n’ai pas été époustouflé par la performance d’Idris Elba. Bien sûr, il est quand même très bon mais il ne m’a jamais véritablement transporté et j’avais préféré Morgan Freeman dans Invictus (même si le rôle est très différent). Dans un vrai rôle à Oscar (surtout dans les circonstances que l’on connaît), il ne devrait quand même pas être très loin de la statuette. Naomie Harris, elle, campe une Winnie Mandela combative et assez impressionnante par moments même si l’actrice a une petite tendance à vouloir trop en faire. Un peu comme ce biopic par moments qui, en ne choisissant pas vraiment une ligne directrice, devient à la longue plus un résumé qu’un film à part entière. Mandela méritait sans doute mieux comme « hommage »…



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