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TimFaitSonCinema
En revenant sur sa jeunesse, Guillaume Gallienne explique les malentendus qui ont fait de sa vie quelque chose de très compliqué jusqu’à qu’il réussisse à s’en détacher : il s’est toujours considéré lui-même comme une fille…
Verdict:
Très drôle, tendre, émouvant et sincère, Les garçons et Guillaume, à table ! est une véritable pépite, un film original et créatif. Pour un coup d’essai, c’est un coup de maître de la part de Guillaume Gallienne aussi bon devant que derrière la caméra.
Coup de coeur:

Guillaume Gallienne, forcément

La date de sortie du film:

20.11.2013

Ce film est réalisé par

Guillaume GALLIENNE

Ce film est tagué dans:

Comédie dramatique César du Meilleur film

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 La Critique


Jusqu’à maintenant, on connaissait Guillaume Gallienne comme homme de télévision (avec ses apparitions dans Le Grand Journal), de radio aussi (sur France Inter), de théâtre (on doit toujours rajouter « de la Comédie Française », attention) et même comme acteur de cinéma où il n’a jamais eu vraiment de grands rôles mais plutôt des apparitions plus ou moins lunaires (dans Le Concert ou le dernier Astérix et Obélix). Il a même écrit des livrets pour des ballets. C’est donc à un artiste multicarte auquel on a affaire. Entre toutes ses activités, il avait aussi pris le temps de monter un spectacle autobiographique racontant l’éducation qu’il a reçu étant jeune et ce que cela a pu impliquer dans sa vie. Ce one-man-show avait rencontré un bon succès il y a trois ans et son interprète avait même remporté un Molière (révélation théâtrale masculine) et d’autres prix du même genre. Quand il a décidé de l’adapter en film, il faut bien dire que certains se sont posé des questions. C’était un pari risqué et ambitieux, d’autant que les choses très personnelles passent parfois moins bien au cinéma que dans une ambiance de théâtre. A Cannes, où il a été présenté dans la sélection Un Certain Regard cette année, c’est plutôt un tonnerre d’applaudissement (dix minutes non-stop, ce qui n’est pas habituel) qui a accueilli la première réalisation d’un visage devenu familier dans le paysage cinématographique français. La légende urbaine veut même que des journalistes aient demandé la présence de sous-titres tant on ne pouvait plus suivre à cause du bruit fait par les trop nombreux rires. Autant dire que ce film est attendu depuis et j’ai eu la chance d’assister à une avant-première presque deux mois avant sa sortie officielle. Je n’ai qu’une chose à dire : on tient sans doute là le film français de l’année et une des meilleures comédies depuis longtemps.

Assister pendant presque une heure et demie à un exercice de psychanalyse, ça pourrait paraître au premier abord déroutant, voire même dérangeant. C’est pourtant ce que nous offre Guillaume Gallienne ici, mine de rien. Et même plus, puisque c’est de lui-même dont il s’agit. C’est en effet tout l’objet du film qui reprend donc le spectacle créé par le réalisateur-acteur. D’ailleurs, la mise en scène donne une part non négligeable au spectacle en lui-même puisqu’on revient souvent sur cette scène, bien qu’on ne voie jamais le public et qu’on ait l’impression qu’il soit seul. Cela constitue en fait la voix-off et la trame de tout le film où les différents épisodes sont ensuite mis en image. Et Guillaume Gallienne se joue non seulement lui-même (à tous les âges) mais il décide aussi de prendre à son compte le rôle si important de sa mère. Car, il faut bien le dire, c’est elle qui est centrale dans tout le long métrage. Elle se trouve au cœur du malentendu initial contre lequel le fils va finir par se battre. A force de toujours le différencier de ses deux frères (d’où le titre qui vient de ce que Gallienne a entendu pendant toute sa jeunesse), elle finit par le persuader qu’il est une femme. C’est un concept assez baroque raconté comme cela mais qui est formidablement bien mis en mot et en image par ce film. On comprend les mécanismes qui ont poussé ce jeune garçon à se croire jeune fille puis homosexuel. Autour de cette idée de féminité « imposée », Gallienne invente tout un univers parfois assez déjanté (la séquence complètement folle où il imite Sissi) mais qui a finalement toujours un côté doux-amer. On n’est ainsi absolument jamais dans la comédie pure, même s’il y a de francs moments de rigolade.

Car ce qui est vraiment remarquable dans ce film, c’est cette facilité qu’il a pour passer en deux temps trois mouvements d’un moment extrêmement comique à un passage bien plus dramatique. Cela tient d’abord dans le fait que c’est extrêmement rythmé et que les évènements s’enchaînent à grande vitesse. D’ailleurs, à certains moments, on pourrait espérer que le scénario passe un peu plus de temps sur tel ou tel élément. L’ensemble est finalement presque un peu trop court tant le matériau est riche. Mais la manière de raconter cette histoire, en montrant toujours les fêlures que toute cette éducation ont pu laisser, est aussi très importante et participe grandement au succès de ce film. Gallienne réussit à trouver une certaine distance qui lui permet justement de ne pas tomber dans la farce mais de toujours être sur le fil de l’émotion. Car, au fond, c’est bien d’une succession de malheurs et d’humiliations dont parle ce film. En effet, tout le récit de cette jeunesse nous emmène en Espagne, dans une pension et même en Angleterre où le jeune Guillaume va avoir beaucoup de mal à trouver véritablement sa place parce qu’il n’est pas considéré à sa juste valeur (et qu’il ne semble pas lui-même se considérer tel qu’il est vraiment). C’est bien cette distorsion que le jeune Gallienne a véritablement vécu qui est au cœur du film et c’est aussi, toujours en toile de fond, une réflexion sur l’homosexualité qui est loin d’être idiote et qui, même, mérite le détour. Et le réalisateur réussit véritablement à faire de ce sujet pas évident au premier abord un film à la fois grave par moments mais surtout extrêmement joyeux et lumineux.

En effet, rarement ces derniers temps, j’ai autant ri au cinéma. Les garçons et Guillaume, à table !, en plus de présenter une galerie de personnages géniaux (la grand-mère est incroyable, notamment quand elle commence à s’embrouiller) recèle d’un nombre très important de séquences appelées à devenir culte (l’arrivée en Espagne, le service militaire ou encore la cure thermale en Autriche). Ce sont de vrais très bons moments de comédie, parfaitement écrits (dialogues au cordeau, expressions mythiques), réalisés et amenés. Ils sont ni lourds, ni traités avec trop de délicatesse mais juste très bien sentis. C’est dans l’ensemble très inventif, avec, parfois des raccords très intelligents, il y a une multitude de petites idées par-ci par-là et la musique est plutôt pas mal du tout. Bref, c’est un vrai bonheur de cinéma. Allez, pour faire la fine bouche, il y a peut-être quelques tous petits défauts (quelques longueurs minimes notamment ou des séquences un peu plus discutables sur le fond), mais, honnêtement, ils ne pèsent pas suffisamment pour réellement les évoquer. En fait, ce qui manque le plus, c’est sans doute encore plus de film pour creuser davantage ce personnage… Je retournerai le voir avec plaisir lorsqu’il sortira vraiment en salles. Et j’espère qu’il rencontrera alors un grand succès car il le mérite vraiment. C’est un film comme on n’en voit pas si souvent et la seule question qui vient après la séance est la suivante : que peut faire Guillaume Gallienne après une telle réussite ? Il ne peut nécessairement plus faire un film comme celui-là et il sera donc obligé de se réinventer. Mais pour cela, je lui fais confiance. Visiblement, le garçon a de la ressource ! Déjà, faire sa psychanalyse au cinéma, c’était couillu. Alors, la réussir de cette façon…

REVU LE 30/11/2013


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Emma 04.09.2013, 22:12

Tu me rediras d'aller le voir au moment venu ! Ca a l'air bien :)
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mht 24.11.2013, 13:23

En tout point d'accord avec toi : une petite pépite, très drôle, un grand bon moment de cinéma et qui fait réfléchir et discuter aussi ! Tout y est donc !


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