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TimFaitSonCinema
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ATTILA MARCEL

Paul vit depuis trente ans avec deux vieilles tantes qui font tout pour qu’il devienne un as du piano. Mais lui, muet, semble bien malheureux, surtout qu’il a du mal à se souvenir de ses parents qu’il a perdu à deux ans. Mais sa rencontre avec Madame Proust va bouleverser son existence…
Verdict:
Hors du temps, sensible et parfois drôle, Attila Marcel est vraiment un film attachant. Ce n’est pas parfait mais il y a une vraie poésie qui s’en dégage et Guillaume Gouix est parfait. Une jolie réussite…
Coup de coeur:

Guillaume Gouix

La date de sortie du film:

30.10.2013

Ce film est réalisé par

Sylvain CHOMET

Ce film est tagué dans:

Comédie dramatique

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 La Critique


S’il y a bien quelqu’un que je voulais voir passer de l’animation aux prises de vue réelles, c’est bien Sylvain Chomet. En effet, celui qui s’est fait connaître par ses bandes dessinées puis, surtout par ses films d’animation possédait vraiment un quelque chose qu’il pouvait sans souci mettre au service du cinéma plus traditionnel. En 2003, lorsque Les triplettes de Belleville était sorti, ça avait été une forme de révolution dans le paysage de l’animation française puisque, en plus de rencontrer un succès publique, ce film avait émerveillé la critique et la profession : il avait même été nominé dans la catégorie du meilleur film aux César, ce qui est très rare pour un dessin animé (il y a eu depuis Persepolis dans le même cas mais, c’était, je crois, la première fois). Il faut dire que c’était une vraie petite pépite, qui ne ressemblait à pas grand-chose d’autre. Sylvain Chomet a depuis réalisé ce que je considère comme l’un des plus « beaux » films de ces dernières années avec L’illusioniste, fable magnifique et très touchante qui n’a pas connu le succès public escompté (quand même 300 000 entrées, ce qui n’est pas rien non plus pour ce genre de films). Entre temps, Chomet était tout de même passé « derrière la caméra » en mettant en scène l’un des segments de Paris, je t’aime. Mais c’est bien avec Attila Marcel qu’il passe vraiment à la prise de vue réelle. Pour cela, il s’est lui-même écrit un scénario et il donne sa chance à un acteur (Guillaume Gouix) encore méconnu du grand public mais qui mérite vraiment de l’être davantage car il est souvent excellent. Il s’avère aussi que c’est le dernier rôle au cinéma de Bernadette Lafont… Et Attila Marcel est au final une jolie surprise et c’est déjà plus que bien comme ça.

En passant à la prise de vue réelle, Sylvain Chomet ne se « renie » pas, loin de là. En effet, Attila Marcel ressemble dans l’esprit beaucoup à ce qu’il a pu faire auparavant. D’ailleurs, sur le scénario, il y a une histoire assez drôle puisqu’il dit avoir trouvé le titre (assez formidable car nous plongeant directement dans une ambiance particulière) et qu’il a ensuite construit son histoire autour de celui-ci. Je me dis d’ailleurs que ce n’est pas un hasard si son personnage principal est muet alors que L’illusioniste était justement un long métrage où la parole était plus que rare. C’est plus qu’un clin d’œil en tout cas. Dans l’ambiance, dans ce côté un peu « hors du temps », dans cet humour tendre et décalé, dans cet aspect presque fantastique par moments, Sylvain Chomet transpose vraiment son univers de dessin animé dans la vie réelle. Car l’histoire se déroule bien à notre époque, en plein cœur de Paris. Mais il donne une vision très personnelle d’aujourd’hui puisqu’on a toujours l’impression d’être un peu en décalage : que ce soient les décors ou les costumes (notamment du personnage principal et de ses deux tantes), ils font extrêmement vieillots et montrent bien le côté totalement sclérosé de la vie de ce jeune homme. Ce décalage permanent est assez réjouissant et le réalisateur y prend un vrai plaisir, surtout que c’est renforcé par les flashbacks très nombreux (le fruit des souvenirs de Paul) qui, eux, pour le coup, nous plongent dans un passé presque mythifié. Car on va revivre avec Paul les principaux moments de sa petite enfance (à deux ans) qui vont lui faire comprendre qui étaient réellement ses parents. Ces passages sont très différenciés des autres, notamment dans le travail de l’image ou encore l’utilisation de la musique (toujours très importante pour Chomet) puisque ce sont la plupart du temps des chansons ou des thèmes musicaux qui accompagnent ces résurgences du passé. D’ailleurs, dans l’ensemble du long métrage, la musique a une importance capitale (Paul est pianiste et des thèmes particuliers reviennent assez souvent) pour marquer des étapes.

Mais Attila Marcel est surtout touchant dans cette manière qu’il a d’aborder les problèmes (la maladie, l’amour) de manière sensible et jamais frontalement mais, là encore, toujours en décalage. Les choses ne sont jamais dites clairement mais se découvrent au détour d’une scène, d’un plan ou d’un dialogue. Ainsi, le film se construit autant sur des éléments presque pas tangibles que sur ce qui est véritablement montré à l’image. Même s’il n’est pas exempt de quelques petites longueurs, d’éléments moins réussis et de raccourcis parfois exagérés, c’est une vraie tendresse qui se dégage de ce film, notamment dans une fin attendue mais émouvante, et c’est cela que l’on a envie de retenir en sortant. Certaines séquences valent ainsi vraiment le détour comme ce combat de catch qui est un vrai moment de grâce (dit comme cela, ça peut paraître étrange, j’en ai bien conscience…). C’est aussi un vrai petit bonheur d’humour subtil. Ce n’est pas toujours drôle (loin de là) mais plein de petits éléments ci-et-là font rire, notamment ce rapport à Marcel Proust, à travers une citation initiale, le nom de la femme qui va changer le destin de Paul mais surtout par cet usage décalé (encore une fois) de la fameuse madeleine qui, là, sert à faire passer le goût des infusions qui permettent aux souvenirs de revenir à la surface. Dans le rôle principal, Guillaume Gouix est vraiment formidable et, grâce à un jeu tout en nuances, parvient très bien à rendre tous les sentiments qui affluent chez ce jeune homme muet et un peu coupé de la vraie réalité. Face à lui, en fofolle au grand cœur, on retrouve Anne Le Ny, très bonne elle aussi. Les deux tantes sont, elles, interprétées avec talent par Hélène Vincent et, donc, Bernadette Lafont. On peut dire que cette dernière part sur une bonne note car Attila Marcel est vraiment un joli film dont on en veut retenir que les bons moments.



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