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TimFaitSonCinema
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11.6

Toni Musulin est convoyeur de fond à Lyon depuis dix ans. Un matin de novembre, il décide de se faire la belle avec le fourgon et les 11,6 millions d’euros qui se trouvaient dedans. Et le coup était plutôt bien préparé…
Verdict:
Un film pas malhonnête mais qui arrive sans doute un peu tôt par rapport à une histoire très récente. En manquant de recul, 11.6 reste trop superficiel. Pourtant, que ce personnage est intéressant et plutôt bien interprété par François Cluzet.
Coup de coeur:

François Cluzet

La date de sortie du film:

03.04.2013

Ce film est réalisé par

Philippe GODEAU

Ce film est tagué dans:

Thriller

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 La Critique


Il y a trois ans et demi, il était devenu un personnage mythique dans le paysage français, certains le voyant comme un nouveau Robin des Bois ou comme celui qui a réussi à vraiment embêter le système (je n’en suis pas, je vous le dis tout de suite). Lui, c’est Toni Musulin, convoyeur de fond qui a disparu avec plus de deux millions d’euros (sur les onze et quelques que comptait le fourgon) et qui s’est rendu une dizaine de jours plus tard aux policier monégasques. Le plus grand mystère entoure encore cette affaire : où sont passés ces fameux deux millions ? Pourquoi s’être rendu ?... Les questions sont aussi nombreuses que les réponses sont difficiles à saisir. Pourtant, alors que Musulin est encore en prison (il a été condamné à cinq ans en appel), le cinéma s’empare déjà de cette histoire, il faut bien le dire, assez hors normes puisqu’il s’agit finalement d’un détournement de fonds sans aucune violence. Et c’est Philippe Godeau, réalisateur du plutôt honnête Le dernier pour la route, son premier film, qui a décidé de s’attaquer à ce que l’on pourrait qualifier de « fiction très proche de la réalité ». En effet, le scénario est basé sur un livre que Musulin lui-même a validé. Cela n’est pas sans poser quelques problèmes, surtout quand on sait le flou qui entoure encore l’affaire. D’ailleurs, on ressent cela au visionnage d’un film qui a du mal à vraiment décoller et devenir passionnant, alors que le personnage, lui, est en quelque sorte fascinant.

Ce qui est sans doute le plus fascinant dans ce film, c’est qu’on est face à un véritable scénario de fiction, qui pourrait être la base d’un vrai film d’action ou d’un thriller implacable. N’importe lequel des scénaristes aurait bien aimé écrire une telle histoire, avec sa part de mystère, son côté complètement fascinant et presque absurde. Le souci, c’est que l’on est ici face à la réalité. Et une réalité extrêmement récente et encore présente dans les mémoires collectives. Personnellement, il y a quelque chose qui me gène dans le fait de mettre en scène aussi vite une telle histoire. Il faudrait avoir un minimum de recul afin de pouvoir mieux analyser un personnage taiseux et qui n’a rien livré (ou si peu) à la police. Il s’est même plutôt amusé avec elle. 11.6 a le mérite de ne pas prendre parti ni de juger le personnage. Le récit qui est fait a quelque chose d’assez clinique, renforcé par une esthétique très très froide (et qui ne me plaît pas des masses dans l’ensemble). Les couleurs sont presque absentes (si ce n’est la Ferrari rouge pétante) dans cette banlieue lyonnaise ainsi que dans les costumes. Le gris est bien la teinte dominante et semble indiquer que tout est, dans cette histoire, ni noir ni blanc. Ainsi, le film semble toujours un peu hésiter entre une vision très réaliste (mais ce n’est pas un documentaire) ou quelque chose d’un peu plus fictionnel. Ce dilemme, qui se pose forcément quand on s’attaque à quelque chose d’aussi récent, traverse tout le film et le réalisateur ne semble jamais véritablement en mesure d’y répondre efficacement. Sans doute parce qu’il n’a pas le matériau suffisant, étant donné le trop peu de temps de recul dont il dispose.

Le film ne peut pas se construire sur un suspense car, de fait, il n’y en n’a pas. Tout le monde connaît l’histoire et le film débute même par la rémission monégasque du convoyeur. D’autres ressorts devront donc être utilisés et c’est plutôt à la manière dont il va peu à peu imaginer et préparer son coup que 11.6 s’intéresse. Il montre en fait une partie du mécanisme qui a pu conduire Musulin (François Cluzet, très bon dans un rôle tout en intériorité et en colère rentrée) à commettre son acte. Il y a d’abord sa fascination pour les belles voitures, sa forme de pingrerie mais, surtout, les petites humiliations de ses chefs qui lui refusent des jours de congé et le traitent un peu comme n’importe qui. C’est sûr que ces éléments permettent de commencer à comprendre l’homme mais le film ne permet pas d’aller plus loin que des explications finalement assez simples. Des pistes sont lancées (une soirée branchée, une fille rencontrée) mais aussi vite délaissées, comme pour renforcer le mystère. La véritable psychologie de Musulin ne nous est pas montrée ici et il n’y a pas vraiment de tentative de le faire, là encore sans doute parce que la réalité est à la fois trop présente et trop partielle. Elle ne permet en tout cas pas vraiment de prendre des libertés trop importantes. Par contre, là où le film est vraiment intéressant, c’est dans la manière dont il montre comment, peu à peu, ayant conscience que son projet est dangereux pour ceux à qui il tient, il va tout faire pour couper les ponts. Mais c’est à sa manière, c'est-à-dire sans rien dire ou presque mais par petites touches. C’est notamment le cas avec sa copine qui finit par être excédée de son comportement mais aussi avec son collègue le plus proche qu’il va essayer d’écarter. Mais sinon, le film ne lève pas les interrogations, loin de là, et aurait presque tendance à en poser d’avantage. D’un personnage réel, le film ne souhaite pas faire un vrai « héros » de fiction et, ainsi, se perd un peu dans cet entre-deux pas forcément évident à gérer.



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