Toggle navigation
TimFaitSonCinema

IMPURS DE DAVID VANN

 L'Article


David Vann

Galen vit avec sa mère dans une grande demeure située au plein cœur de la Californie. Elle fait tout pour le protéger tout en lui cachant visiblement beaucoup de choses. Lui essaie de se livrer à la méditation pour sortir de ce carcan. Si on rajoute à cela une grand-mère riche en maison de retraite, une tante acariâtre et une cousine plus qu’allumeuse, on se retrouve avec une situation plus qu’explosive qui risque à tout moment de déraper.

David Vann en est donc à son troisième roman publié en France. Son premier, Sukkwan Island avait constitué pour moi un vrai choc littéraire et avait d’ailleurs plutôt été bien reçu en France puisqu’il avait notamment remporté le Prix Médicis étranger. Depuis, l’auteur a continué à creuser son sillon avec Désolations, une autre histoire de famille un peu tordue, où tout se dérègle peu à peu, jusqu’à ce que les tensions soient trop fortes et les drames inévitables. Cette fois-ci encore, avec Impurs, le romancier s’intéresse à des relations familiales un peu particulières et plus précisément ici entre une mère et son fils. Ici, le père est complètement absent et les hommes en général le sont, si ce n’est la figure mythique du grand-père paternel qui, visiblement, n’était pas particulièrement un tendre. Avec ses deux livres précédents, on peut presque parler d’une forme de trilogie sur les questionnements autour de la famille que le romancier pourrait refermer, car il serait peut-être temps que Vann change un peu de sujet, même s’il excelle dans cette sorte de « dissection » des problèmes familiaux.

Ici, c’est le fils qui est le personnage principal et c’est à travers ses yeux et sa perception que l’on va avoir droit à cette histoire. Et dès le départ, on comprend que ce n’est pas forcément le personnage le plus stable qu’il nous ait été donné de voir : surprotégé par sa mère, adepte de la méditation, ce Galen est un jeune homme plus que torturé. Et il évolue en plus au sein d’une famille qui ne le gâte pas beaucoup car les quatre femmes qui l’entourent ont chacune leurs névroses. Peu à peu, néanmoins, grâce à une forme d’effet « entonnoir » (qui ressemble à la structure du premier roman de Vann), Désolations va s’intéresser plus particulièrement à la relation entre un fils et sa mère, celle-ci prenant des accès de plus en plus tragiques. Je n’en dis pas plus car sinon je dévoile une grande partie de l’intérêt du livre mais il faut savoir que la violence et la folie sont encore au cœur de son ouvrage. Il y a avec les livres de David Vann une sorte de fascination assez incroyable quand on les lit car on se rend bien compte que l’on va toujours vers le pire mais on a vraiment beaucoup de mal à véritablement lâcher le livre que l’on est en train de lire. Cela tient sans doute aussi à la force d’évocation de son écriture. Beaucoup de choses sont dites mais presque plus ne le sont pas vraiment ou de manière détournée. Cela donne un nouveau roman d’une très grande puissance, qui justifie une nouvelle fois la réputation naissante de son auteur comme d’un écrivain qu’il faut vraiment suivre car il risque de compter dans les années à venir.

« Sa mère, sa tante et sa cousine prenaient le thé. Les bruits de leurs mouvements s’étaient tus. Rien que le bourdonnement des mouches et des abeilles en vol non loin de lui, les atterrissages secs des sauterelles, une voiture qui passait de temps à autre. Le monde dans son immensité et dans son néant si décevant.
Galen roula dans la terre sur le flanc, loin des séchoirs, Comme ça. Sans décision, il roula et tout disparut, l’expérience toute entière, gâchée, et il se trouvait encore une fois dans la terre. Rien d’appris, rien d’acquis.»

David Vann poursuit dans la lignée de ses deux ouvrages précédents en nous offrant une nouvelle fois un récit dense et puissant qui montre la destinée tragique d’une famille et la progressive descente aux enfers d’un fils torturé. Le style est toujours aussi incroyable et le propos décapant. Encore un roman qui ne peut laisser indifférent.

Impurs




 Rédiger Un Commentaire