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GOAT MOUNTAIN DE DAVID VANN

 L'Article


David Vann

Pour ce jeune garçon de onze ans, c’est un week-end exceptionnel qui s’annonce puisqu’avec son père, son grand-père et un ami de la famille, il va participer pour la première fois à la chasse au cerf, coutume familiale ancestrale. Alors qu’ils viennent d’arriver, ils repèrent un braconnier sur leurs terres. Le fils prend l’arme dans ses mains, observe l’homme à la lunette et, à ce moment-là, quelque chose se passe dans sa tête et il tue l’homme. Son premier cadavre ne sera pas celui d’un animal mais celui d’un humain… Et plus rien ne sera comme avant…

Depuis son premier livre, je suis devenu un très grand fan de David Vann, écrivain dont il faut absolument découvrir le fascinant Sukkwan Island avant de se plonger dans ses deux livres suivants, tout aussi durs mais magnifiques (Désolations et Impurs). J’arrivais donc plutôt confiant devant ce quatrième roman (Dernier jour sur terre est trop différent pour être compté avec) mais, et je suis presque désolé de le dire, j’ai vraiment eu du mal avec et la preuve en est que j’ai mis du temps à arriver au bout, réussissant difficilement à lire plus d’une vingtaine de pages sans éprouver de l’ennui. Pourtant, les trois autres, je les avais dévorés sans pouvoir m’arrêter… Pourtant, on retrouve tout ce qui fait la force de l’écriture de David Vann avec un style très poétique, une grande importance donnée aux descriptions de nature, une histoire où les relations familiales sont pourries, un huis-clos oppressant, un événement tragique,… Tout y est mais ça ne fonctionne pas vraiment. Honnêtement, j’ai un peu de mal à expliquer ce qui fait que, cette fois-ci, ça ne fonctionne pas chez moi, mais je vais essayer de donner quelques pistes.

D’abord, ce qui est le plus étonnant, c’est sans doute le fait que l’on ait vraiment l’impression que c’est autobiographique. Ce n’est pas la première fois qu’un tel dispositif est utilisé et David Vann en est vraiment friand mais, là, quand on connaît l’histoire, ça a quelque chose d’assez troublant. Car, en fait, ce n’est pas vraiment l’enfant de onze ans qui raconte cette histoire mais bien l’adulte qu’il est devenu. Et c’est là selon moi que le bât blesse principalement. En effet, il analyse toujours ce qui s’est passé selon ses yeux d’adulte, ce qui fait que l’on n’est jamais véritablement à la place de l’enfant. Un tel dispositif met forcément une distance très importante et, pour le lecteur, avancer dans le livre devient de plus en plus compliqué. Surtout que David Vann surligne tout ici de références multiples à la Bible, comme si son histoire n’était pas suffisamment forte à la base (pourtant, Dieu sait si elle l’est). Là où je trouvais d’habitude son écriture agréable, elle m’a plus dérangé ici tant j’ai eu l’impression que, par moments, il se regardait écrire. Il a du talent, c’est sûr, mais, parfois, on a vraiment le sentiment qu’il le sait trop.  Enfin, il y a peut-être trop de personnages dans e huis-clos (ils sont finalement cinq car le mort tient un rôle bien précis et très important), ce qui implique de moins creuser chacun des protagonistes, même si Vann a toujours cette capacité à « saisir » les hommes en quelques phrases. Finalement un peu déçu…

« Ils regardaient tous les deux par terre, et je savais que je trouverais le braconnier à leurs pieds. Je n'hésitai pas. Une part de moi-même ne tournait pas rond, et je ne pourrais jamais découvrir la source de tout ceci. Je fus en mesure de marcher jusque-là, de regarder ce corps et, bizarrement, je n'en fus pas davantage bouleversé qu'en regardant la carcasse d'un cerf. Si j'éprouvais quelque chose, c'était de l'excitation. Et c'était peut-être parce que, toute ma vie, j'avais vu quantité de cerfs et d'autres cadavres étendus au sol. Nous étions toujours occupés à tuer quelque chose, c'était comme si nous avions été mis ici-bas pour tuer. »

 

C’est clairement le livre de David Vann auquel j’ai le moins accroché. Pourtant, tous les ingrédients y sont mais, là, je trouve qu’il se regarde un peu trop écrire et qu’il n’arrive jamais à réellement nous entraîner au cœur de cette histoire, sans doute du fait d’un angle qui n’est pas forcément le bon pour raconter cette histoire dont on ne saura jamais quel rapport elle peut avoir avec la « vraie vie » de l’auteur. C’est ici particulièrement troublant…

Goat Mountain




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